Réfugiés syriens: la vie reprend le temps d'une escale à Bamako
- 82 syriens sont enregistrés par le HCR vivent dans la capitale malienne en attendant un passeur

Bamako
AA/ Bamako/ Baba Ahmed
D'Alep à Bamako, il a fait le voyage il y a un an. Autrefois dormant sur ses deux oreilles, aujourd'hui il se fait mille et un soucis. Le reste de son périple? L'avenir de sa famille? La dureté du vécu dans un pays qui n'est ni le sien ni celui dont il rêvait, des pensées qui lui font mal et accentuent son égarement.
Jamel le Syrien n'est plus que l'ombre de Jamel Ahmed, mais il tient bon pour sa famille. A Bamako, le temps d'une escale qui vient ponctuer 40 ans et des tranches de vie, espère-t-il, la vie reprend et le coeur palpite encore en attendant une chance.
Un des 82 syriens enregistrés sur la liste du Haut commissariat aux réfugiés des Nations Unies (HCR) de Bamako, Jamel refuse de courber l'échine devant ces temps durs. Soudeur de profession, du temps qu'il était chez lui, il travaille désormais dans un garage de réparation automobile en contrepartie de 200 USD pour le loyer de la chambre qu'il occupe à Yirimadjo, quartier périphérique de Bamako.
Dans son foyer précaire, les jours de Jamal se suivent et se ressemblent. De bonne heure le matin, il se lève, participe au petit-déjeuner de la famille, puis, prépare sa fille avant de l'accompagner à l’école du quartier. Jamal ne laisse rien au hasard. Il vérifie tout: les fournitures scolaires nécessaires, le goûter et les bombons avant de mettre Nadine sur sa moto.
«En attendant d’aller vers d’autres pays, l’Allemagne ou le Canada, la vie continue ici. Il faut bien amener les enfants à l’école pour apprendre», dit Jamal à Anadolu.
Il est bien connu et est le bienvenu dans cette école de Bamako qui accueille d'autres élèves de réfugiés syrien. «Nous avons 17 enfants de réfugiés», précise Robert Sangaré, directeur de l'école, dans une déclaration à Anadolu, soulignant: « certains parmi eux commencent à parler très bien le français, les tout petits s'en sortent pas mal et leur apprentissage se poursuit.»
Ces enfants d'exception apprennent et s'intègrent rapidement, de l'avis du directeur. Certains parmi eux commencent même à parler le Bambara (langue locale).
Mais la facilité de l'intégration et l'hospitalité de la population malienne semblent loin de dissuader Jamel d'aller tenter sa chance en Europe. «J’ai six enfants,dont certains vont à l'école. Avec ma femme et moi, nous sommes huit. Puis, nous sommes confrontés à des maladies comme la malaria et la fièvre typhoïde. Je reconnais que les Maliens sont serviables et généreux, mais il me faut d'autres horizons », plaide-t-il.
Pour lui tout comme pour ses concitoyens, la chaleur et les maladies fréquentes rendent la vie "peu supportable" au Mali.
«Chaque fois qu’un membre de la famille tombe malade, le médecin nous demande de partir, mais où aller ? », s'interroge Jamal, regrettant le fait que des pays comme l’Allemagne, la Grande Bretagne et la Hollande leur "tournent encore le dos".
C'est la raison pour laquelle 82 d'entre eux se sont présentés au bureau du HCR. En accédant au statut de réfugiés, ils espèrent pouvoir atteindre plus facilement l'Europe ou le Canada. Devenu une plateforme de passage, Bamako accueille un nombre encore indéterminé de réfugiés syriens. Les 82 réfugiés y demeurent toutefois pour fréquenter des ambassades occidentales dont ils espèrent toujours qu'elles leur offrent une opportunité d'accueil.Le départ après l'escale revient sans cesse dans les échanges des Syriens vivant à Bamako. La plupart s'adonnent à des petits métiers et sont aidés par la communauté libanaise déjà présente dans la capitale malienne. Quand ils se retrouvent pour échanger les nouvelles, ils parlent pendant des heures du même sujet, mais les nouvelles sont souvent décevantes. « Hier, certains de mes amis qui voulaient se rendre en Turquie ont été rapatriés car il ne disposaient pas de Visa et n'avaient ni crédit à la banque, ni réservation d'hôtel », déplore Jamal.
Arrivant au Mali depuis la Mauritanie, pour laquelle aucun visa n'est exigé, ces Syriens ne comptent toutefois pas jeter l'éponge, alors que leur pays reste embrasé par la guerre. "Au Mali, comme en Mauritanie, en Algérie ou encore au Maroc, on se débrouille, en attendant la première opportunité", tranche Jamal.
Des Syriens au Mali, il n'y en a pas uniquement à Bamako. Près de 2.000 autres réfugiés sont installés à Tombouctou et à Kidal, dans le Nord du pays, selon des sources humanitaires. Ils aspirent, eux aussi, à rejoindre l'autre rive via des passeurs. Leur vécu serait encore plus dur et leur escale moins supportable.
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