Afrique

Malgré les menaces terroristes, le Sénégal continue d'être une "Terre d'asile"

En accueillant deux ex-détenus de Guantanamo, le Sénégal, veut prouver, une fois de plus, qu'elle est une terre d'asile et un protecteur des droits de l'Homme

Esma Ben Said  | 07.04.2016 - Mıse À Jour : 08.04.2016
Malgré les menaces terroristes, le Sénégal continue d'être une "Terre d'asile"

Dakar
AA/Tunis - Dakar / Esma Ben Said - Babacar Dione- Alioune Ndiaye

En accordant l’asile humanitaire à deux ex-détenus de Guantanamo, le Sénégal fait montre, une fois de plus, de sa volonté d’être une terre d’asile et un protecteur des droits de l’Homme, même si, la population émet quelques réserves face à cette nouvelle décision, à l'heure où la menace terroriste plane aussi sur le pays, selon des propos recueillis par Anadolu.

Le Sénégal fêtait, lundi 4 avril 2016, le 56ème anniversaire de son accession à l'indépendance. En marge des festivités, les autorités sénégalaises ont annoncé qu’elles accordaient l’asile humanitaire à deux prisonniers libyens détenus, depuis 14 ans, dans le camp de Guantanamo, sans inculpation ni procès.

En accueillant les deux ex-détenus Salem Abdul Salem Ghereby, (55 ans), et Omar Khalif Mohammed Abu Baker (44 ans), Dakar répond ainsi «favorablement à une demande de Washington», avait déclaré le ministre sénégalais de la Justice, Sidiki Kaba, en conférence de presse animée, lundi soir.

«Le président sénégalais Macky Sall a accepté ce transfert pour des raisons humanitaires», avait insisté le ministre de la Justice, précisant que «l’important est de faire en sorte que cette prison de Guantanamo puisse être fermée, en raison des graves violations des droits humains qui y ont été enregistrés».

Le ministère sénégalais des Affaires étrangères avait, pour sa part, indiqué dans un communiqué, que l’asile accordé aux deux Libyens s’inscrit dans la «tradition d’hospitalité sénégalaise et de solidarité islamique envers deux frères africains ayant exprimé le souhait d’être réinstallés au Sénégal après leur élargissement».

Si cette décision a été également saluée par les défenseurs des droits de l’Homme, dont Human Rights Watch (HRW) qui s’est réjoui de «la compassion» dont fait preuve le gouvernement, elle a suscité quelques inquiétudes au sein de la population sénégalaise.

«Le gouvernement n’aurait pas dû accepter. Notre monde est marqué par le développement du terrorisme et notre pays est lui aussi menacé. Nous devons être prudents. J’espère que les Américains ont attribué une aide financière pour que ces deux Libyens soient surveillés», commente Boubacar Ndiaye, un ouvrier rencontré par Anadolu à Dakar. Des propos que partagent d’ailleurs plusieurs internautes sur les réseaux sociaux.

Pour Mame Goor Ngom, journaliste et analyste politique sénégalais, «par cette action, le Sénégal prend effectivement quelques risques, à la lumière de la conjoncture actuelle. Toutefois, le pays cherche, par ce geste, à asseoir une fois de plus sa notoriété dans le monde en matière de protection des droits de l’Homme».

«Depuis que l’annonce a été faite, le nom du Sénégal est d’ailleurs cité partout dans le monde», a souligné dans une déclaration à Anadolu, M. Ngom, rédacteur en chef du quotidien, "la Tribune", un journal indépendant.

«Le Sénégal est présent presque partout où l’Onu lutte pour la paix et est connu pour être un pays de tradition d’accueil» surenchérit Mandiaye Thiobane, Rédacteur en chef du magazine sénégalais «Nouvel Horizon».


Depuis plusieurs années, le Sénégal, se distingue, en effet, par sa volonté d’être une terre d’accueil de réfugiés et d’exilés en tout genre.

Preuve en est, le pays «héberge» l’ancien président du Mali Amadou Toumani Touré ainsi que Hissen Habré, ex-dirigeant du Tchad (1982-1990) et qui vit en exil au Sénégal depuis son renversement par une rébellion dirigée par Idriss Déby Itno, l’actuel président du Tchad, rappelle Thiobane.

L’ex-dictateur arrêté en 2013 et condamné à mort par contumace au Tchad, est jugé depuis le 20 juillet 2015 à Dakar, «pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture», par une juridiction spéciale créée par l’Union africaine en partenariat avec l’Etat du Sénégal. Le verdict sera d’ailleurs prononcé le 30 mai prochain.

Le Sénégal est aussi le «protecteur» de quelques centaines de réfugiés gambiens ayant fui un régime répressif, à l’instar du rappeur Ali Cham, alias Killa Ace, obligé de s’exiler après la sortie d’un tube, le 23 juin 2015, où il dénonçait les libertés confisquées par le président Yahya Jammeh.

Terre d’accueil encore pour les 162 étudiants Haïtiens, après le séisme qui a frappé leur pays le 12 janvier 2010.

Ces étudiants, dont la plupart sont, depuis, rentrés au bercail, avaient été accueillis, sur initiative du président sénégalais de l'époque, Abdoulaye Wade, au sein de diverses universités du pays, notamment l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar, selon la presse locale.

Wade avait déclaré que le Sénégal était prêt à offrir "toute une région" aux Haïtiens, s’ils décidaient de «revenir à leurs origines».

Les réfugiés mauritaniens ont eux, aussi, bénéficié de l’hospitalité sénégalaise. Ils sont aujourd’hui quelques 13 mille âmes à avoir été intégrés et à bénéficier de carte de réfugiés qui leur confèrent les mêmes droits que ceux octroyés aux Sénégalais, excepté celui du vote, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR) au Sénégal.

Saluant les nombreuses actions du Sénégal, le HCR avait, dans un rapport publié en 2013, qualifié «d’exemplaire la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile au Sénégal, dans un monde où la quête d’asile est de plus en plus perçue comme une menace pour la sécurité des Etats et l’intégrité des frontières.»


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