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Madagascar : Les noms, toute une histoire de vie

Fitia (amour), Aina (vie), Ako (écho) les noms malgaches, composés de plusieurs de ces éléments, sont choisis selon les croyances, les parentés et reflètent souvent le destin particulier que l'on souhaite à un enfant

Esma Ben Said  | 15.06.2016 - Mıse À Jour : 16.06.2016
Madagascar : Les noms, toute une histoire de vie

Antananarivo

AA/Antananarivo/Sandra Rabearisoa

«Ratsimandrava», «Randriamampionona», «Rakotomamonjy », «Rabemananjara» …. ils sont d’une longueur imbattable, les noms malgaches !

Et le record actuel (à échelle mondiale), est détenu par le président du pays, Hery Rajaonarimampianina, dont le nom complet (Hery Martial Rakotoarimanana Rajonarimampianina), contient 44 caractères, de quoi perdre son souffle à peine le nom prononcé.

Mais il existe des noms encore plus longs si l’on remonte le temps ! Notamment celui du prince Andriantsimitoviaminandriandehibe qui a régné de 1650 à 1670. Il détient le record de toute l’histoire de Madagascar.

Trente et une lettre en un seul mot pour nous dire: «Le prince qui ne ressemble à aucun autre grand prince», selon une publication de la section malgache de l'Institut national des langues et civilisations orientales à Paris.

Qu'il soit celui de prince, président, sportifs, artistes, etc. la prononciation des noms malgaches n’est pas une mince affaire pour les étrangers (Vazaha)...pourtant, ces noms "si compliqués", recèlent nombre d'histoires et de secrets.

Les noms les plus longs sont souvent associés aux Malgaches issus des ethnies Merina (natifs d’Antananarivo, la capitale de Madagascar et ses périphéries) ainsi que des Betsileo (un peu plus au Sud), et aucun d’eux n’est choisi au hasard, note Désiré Ramakavelo, analyste socio-politique et historien interrogé par Anadolu.

D’après ce féru de la tradition de son pays, «les Malgaches croient beaucoup aux signes du zodiaque et choisissent les noms de leur progéniture en rapport avec la chance qui se profile pour les uns et les autres. Dans la croyance malgache, le jour et l’heure de la naissance détermine la chance d’un nouveau-né. Des repères qui sont en relation avec les astres dont la lune, le soleil et les étoiles».

«Si un enfant naît par exemple un jour d’éclipse lunaire ou solaire, il peut être considéré comme une personne malchanceuse («Alakaosy» selon le terme malgache). Du coup, il devra être confronté au destin pour pouvoir vivre.»

«Dans la tradition malgache d’antan, les bébés «Alakaosy» étaient placés devant la porte d’une étable. Si l’enfant survit au passage des zébus, la malchance est considérée derrière lui, dans le cas contraire, les parents se résignent» raconte-t-il.

Le choix du nom reflète alors un destin particulier que l’on souhaite à un enfant. Par exemple, Andriamisaina qui comprend le mot «Andriana» (le noble) ou encore «misaina» (intelligent) qui est attribué à l'enfant auquel on souhaite une grande agilité intellectuelle.

«La longueur des noms vient également du fait que souvent les noms du père et de la mère, ou ceux des grands parents sont associés pour nommer l’enfant». Un nom est ainsi souvent le résultat de nombreux rajouts à travers des suffixes et préfixes comme «Zafi» (petite fille ou petit fils de) ou «Zana» (fille de ou fils de).

L’historien prend exemple sur son nom à lui, «Ramakavelo» qui, à ses dires, vient de l’association de deux noms « Ramaka » qui signifie ‘prendre’ et « Ravelo » qui signifie ‘esprit’. Les patronymes les plus courants sont souvent tirés des noms comme Fitia (amour), Aina (vie), Ako (écho), Andry (pilier) entre autres.

«Tous les noms malgaches ont donc leur signification et comporte un sens littéral, ainsi qu’un sens figuré c'est-à-dire l’interprétation du nom», poursuit Ramakavelo.

Dans les anciennes générations, un nom appartenait d'ailleurs à un individu unique et ne se transmettait pas au sein d'une même famille. Les frères et sœurs ne portaient pas le même nom, ajoute-t-il. Toutefois, cette tradition a évolué avec l’histoire de Madagascar et notamment avec l’arrivée des missionnaires qui ont amené le christianisme, ainsi que la période de la colonisation par la France entre 1895 et 1960.

Les noms ont depuis gardé leur longueur, mais les prénoms eux, deviennent marqués d’une empreinte française. D’où l’apparition des prénoms comme Jean, Jules, Marie, Alain etc. aujourd'hui, très courant, sur la Grande Ile.


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