AA/Antananarivo/Sandra Rabearisoa

Le nouveau billet de 20 mille ariary (environ 7 usd) est arrivé dans les portes-monnaies des Malgaches ce lundi.

Pour le gouvernement, cette décision relève avant tout d’une mise en ligne avec les pratiques internationales en remplaçant des billets vieillis et abimés qui circulent depuis plus de dix ans sur le territoire malgache.

La mise en circulation du billet de 20 mille ariary est par ailleurs accompagné d’un renouvellement de tous les billets déjà existants dans le pays, conformément à un décret adopté en Conseil du Gouvernement en mai dernier.

Ainsi, ce lundi la banque centrale de Madagascar (BCM) a émis de nouvelles coupures de 20 mille, 10 mille et 5 mille ariary. Le 18 septembre, d’autres billets de mille, 500, 200 et 100 ariary, suivront.

"Cette émission de nouvelle gamme de billets est un défi national pour l’économie malgache", avait indiqué le Gouverneur de la BCM, Alain Hervé Rasolofondraibe le 7 juillet dernier à Antananarivo, lors d’un point de presse.

Cette gamme de monnaie dont le design respecte le thème "les richesses de Madagascar", a pour objectif de mettre entre les mains des usagers des billets plus modernes et plus sécurisées.

Afin de prévenir d’éventuelles tentatives de contrefaçon, la BCM a également doté les billets d’éléments de sécurité les plus récents et les plus fiables permettant de vérifier aisément leur authenticité.

-Illusion monétaire ?

Pourtant, la mise en circulation de ces nouveaux billets ne rassurent pas les économistes malgaches qui estiment que cela accroitra l’inflation déjà galopante et les risques de transactions douteuses.

" Il est clair que seul les plus riches seront les principaux détenteurs de ces gros billets. Ainsi, le risque est grand de voir ces billets utilisés dans le cadre d’une économie souterraine voire criminelle », a indiqué en ce sens Rado Ratobisaona, président du groupe des Jeunes Leaders Malagasy (GJLM), composé entre autres, de jeunes économistes.

"Par ailleurs, à  très court terme, les Malgaches vont croire à la valeur intrinsèque de la monnaie. Mais plus tard, ils découvriront une diminution de sa vraie valeur réelle,(et donc une perte de la valeur d'achat) d’où le phénomène d’illusion monétaire"», explique l’économiste qui s'exprimait en conférence de presse mercredi dernier.

Ralison Roger, docteur d’Etat en économie (option gestion) et professeur d’Economie à l’Université d’Antananarivo, craint, lui aussi, une dévaluation de la monnaie malgache.

"L’émission de ces nouveaux billets montre un signe de la faiblesse de notre économie et une faille dans la politique monétaire", affirme-t-il à Anadolu, prenant exemple sur le cas du Zimbabwe qui dispose d’un billet unique de 1 million de dollar zimbabwéen qui a pourtant très peu de valeur.

Il reconnait, toutefois, que cette nouvelle émission pourrait contribuer à la lutte contre la prolifération des faux billets ainsi qu’à la facilitation des transactions commerciales.

L’idéal, souligne Raison Roger, « aurait été que l’Etat mène une campagne en guise de préparation psychologique auprès de la population pour éviter toute appréhension ».

Le dernier renouvellement intégral des billets malgaches remonte à 2003. Cette période correspond aussi à la première utilisation de l’ariary, l’unité monétaire propre à la République de Madagascar.

Pourtant, depuis sa mise en circulation la monnaie malgache connait une dépréciation importante. Le taux de change de l'ariary était de 1 Usd pour 1 200 ariary, alors qu’1 Usd s’échange actuellement à 3 000 ariary.