AA/ Dakar/ Alioune Ndiaye

Le massacre de tirailleurs sénégalais au camp de Thiaroye (banlieue dakaroise) par l’armée coloniale française en 1944 a été commémoré sur place ce lundi.

C’est la 2ème année consécutive où cet événement tragique fait l’objet d’une commémoration par l'État sénégalais qui, en 2024, a institutionnalisé le 1er décembre journée du tirailleur.

Le 1er décembre 1944 en effet, des tirailleurs sénégalais revenus de la Seconde Guerre mondiale et cantonnés au camp de Thiaroye en attendant leur retour dans leurs pays respectifs, avaient été froidement exécutés par l’armée coloniale française alors qu’ils protestaient contre la rétention de leur primes et allocations. Les chiffres officiels de 35 puis 70 morts annoncés par la France sont récusés par des historiens qui évoquent des centaines de morts.

« Leur sort fut tragique, une fois la mission terminée, puisqu'ils furent brutalement assassinés par l'armée coloniale. Leur seul tort étant d'avoir réclamé le paiement de leurs dues, la reconnaissance de leur dignité et le respect de la parole donnée », a relevé le président Bassirou Diomaye Faye lors de son allocution.

La reconnaissance par la France que Thiaroye a été « un massacre » est selon lui un pas important.

« Nous sommes réunis sur cette terre meurtrie de Thiaroye, pour rappeler que la vérité ne s'efface jamais. Elle finit toujours par réclamer justice. C’est le sens de notre présence ici, pour honorer la mémoire des tirailleurs sénégalais et des africains venus de divers horizons qui ont versé leur sang pour la libération de la France », a-t-il poursuivi, se réjouissant des avancées constatées depuis la 1ère édition.

Le comité pour la commémoration du massacre des tirailleurs sénégalais à Thiaroye mis en place a publié en octobre 2025 un livre blanc sur la tragédie et entrepris des fouilles archéologiques sur le site.

Les rédacteurs du livre blanc ont soutenu que le massacre de Thiaroye a été « prémédité et camouflé » par les autorités françaises.

Mamadou Diouf, président du Comité avait pour autant déploré la rétention de certaines archives par la France, appelant à une mise à disposition intégrale pour une compréhension plus claire de ces événements.

« Ce document fondamental (livre blanc), fruit d'un travail scientifique et d'une enquête minutieuse, s'appuie sur des archives, sur la parole des témoins et sur des preuves matérielles pour reconstituer les faits et restituer la dignité aux martyrs », a souligné le président Faye, renouvelant son engagement pour que la mémoire des martyrs de cette tragédie continue de vivre dans notre pays.

« La Gambie a également envoyé ses fils à la guerre. On a répondu au même appel non par choix mais par la force des empires qui nous ont colonisés (…) Le massacre de Thiaroye est un acte de trahison », a posé pour sa part Adama Barrow, président de la Gambie.

D’autres chefs d'État africains ont envoyé un représentant à la cérémonie.

« La Côte d’Ivoire tient à exprimer sa solidarité et son respect envers ces soldats tombés au nom d’un idéal qu’ils incarnaient et qu’ils incarnent encore avec courage. Les tirailleurs tombés à Thiaroye ont marqué notre histoire et donné leur vie pour un monde meilleur », a fait comprendre Tiémoko Meyliet Koné, vice-président de ce pays ayant fourni des hommes au régiment des tirailleurs sénégalais.

Génériquement appelés tirailleurs sénégalais, ce régiment de l’armée coloniale française était composé de soldats indigènes en provenance des pays d’Afrique subsaharienne sous domination française.