Journée nationale de l’artisanat et de l’habit traditionnel : La Tunisie fête son patrimoine

Tunisia
AA / Tunis / Hajer Cherni
La Tunisie célèbre la Journée Nationale de l’Artisanat et de l’Habit Traditionnel qui coïncide avec le 16 mars de chaque année. Les festivités de cette journée sont souvent marquées par l'organisation de plusieurs spectacles de rues à travers les régions, notamment dans les établissements scolaires.
Ces célébrations sont organisées à l'honneur des artisans, ces mains en or, qui détiennent un véritable savoir-faire artisanal admiré par les passionnés des créations authentiques. C’est aussi une occasion pour toutes les franges de la société pour ancrer les valeurs d'appartenance historique et identitaire au pays.
Le domaine de l'artisanat est un secteur stratégique et une fierté pour le pays de par ses dimensions culturelle, économique et historique.
* Un patrimoine qui raconte tout un vécu à travers des siècles
La Tunisie, de par ses multiples brassages, dispose d'un patrimoine artisanal riche. Les souks de la Médina de Tunis, où cohabitent des palais de notables et différents souks, aux spécificités variées, abritent la fine fleur de l'artisanat. Des produits “ fait main” prisés et sollicités aux quatre coins du pays.
Quand on déambule dans les ruelles de la Médina, un spectacle olfactif nous embarque dans un voyage à travers le temps. Les articles exhibés dans les vitrines nous donnent, simplement, envie de pousser la porte des échoppes dans ce souk que les Tunisiens appellent ''le souk des touristes'' présentant un festival de couleurs.
Dans ses ruelles grouillantes, des bijoutiers, des vendeurs d’épices, du cuivre, de tissus et de parfums, sirotent leur café devant leurs magasins et guettent les passants, dans l’espoir de les convaincre d'acheter leurs produits.
Ils insistent et interpellent les clients qui s’arrêtent, le plus souvent, pour regarder et savourer les produits locaux sans avoir forcément l’intention de les acheter. Ces vendeurs tentent de les conquérir en leur proposant des prix abordables.
Ils fixent un regard persistant sur tout visiteur et font tout pour séduire les passants… ils les invitent à ‘’avoir une idée’’ sur leur produits qu'ils qualifient de valeur sûre et du 100% tunisien. Des créations qui nécessitent plusieurs nuits de travail.
Faute de moyen ou de budget, les visiteurs de ce souk s’y rendent pour admirer les belles vitrines aux couleurs vivantes, les couffins, les broderies et les habits, et profitent, par la même occasion, de la pléiade de saveurs qui se dégage dans la Médina. L’odeur du jasmin, des senteurs et des gourmandises tunisiennes laissent une douce nostalgie dans l’atmosphère. Le bruit du martèlement sur les plateaux en cuivre nous transporte plusieurs années en arrière et fait resurgir des souvenirs du bon vieux temps.
Quelques mois seulement nous séparent de l'été et des festivités religieuses, en Tunisie, les gens se préparent, avant le début des célébrations, de faire le choix des habits traditionnels qui ont su garder leur charme d’antan.
Entre Jebba, Fouta et Blouza, Bournous et chéchia ou encore le fameux maryoul Fadhila, faire son choix est difficile car chaque habit est unique, cachant sa propre histoire.
Les habits traditionnels n'ont rien perdu de leur valeur et à chaque occasion, femmes, hommes et enfants portent leurs plus belles tenues traditionnelles selon la région dont ils sont originaires.
Pour les grandes occasions, on fait appel à des brodeuses à la main qui tissent selon le type du tissu dont la broderie diffère aussi d'une région à une autre. Ces costumes brodés à la main se distinguent par des tissus en soie ou en haiek, au fil argenté ou doré pour les embellir.
Croisé au souk alors qu'il s'apprêtait à fermer sa boutique, Mohssen vendeur d'habits traditionnels, a raconté à Anadolu son quotidien et sa lutte pour survivre de ce secteur fortement affecté par la crise qui touche le tourisme.
''L’artisanat tunisien, n’est pas seulement mon gagne-pain mais aussi ma passion. Malgré cette crise, la vie continue et les échoppes restent ouvertes'', a-t-il assuré.
Il a ajouté que ces souks vivent à la lenteur du même rythme, depuis des années.
''Autrefois convoitisé, aujourd'hui, notre artisanat souffre et ce, depuis que les touristes ont déserté nos souks'', a-t-il regretté.
Et de marteler, ‘’outre la crise économique accablante, des articles d'artisanat tunisien contrefaits sont vendus dans nos souks. Des chéchias et des Djebbas de contrefaçon inondent les magasins. imaginez à quelques instants l’ampleur de ce nouveau business’’.
Sihem, une jeune fille de 25 ans accompagnée de sa copine, rencontrée dans le souk où se vendent les babouches en cuir, était à la recherche d'un cadeau original qu'elle compte offrir à des amis étrangers.
''Je suis fière de mon patrimoine et de la richesse artisanale que possède notre pays. En revanche, je n'ai toujours pas trouvé ma pépite. Un cadeau qui fait honneur à la Tunisie'', a-t-elle indiqué.
Et de poursuivre, ''malheureusement la finition de certains produits n’est plus parfaite comme avant''.
Un avis que ne partage guère son amie. ''Pour moi, les articles présentés sont d'une qualité irréprochable. C'est du cuir tunisien et nous devons en être fiers. Ces artisans luttent pour nous présenter des articles ''hand made'' de bonne qualité malgré les difficultés qu'ils rencontrent au quotidien et la crise que traverse la Tunisie'', dit-elle.
''Notre artisanat représente notre identité tunisienne et notre savoir-faire ancestral. Nous avons la responsabilité de le préserver'', insiste-t-elle.
* En crise économique… des menaces planent sur le secteur de l'artisanat
Le secteur de l'artisanat joue un rôle primordial. Il contribue au renforcement de l'équilibre social et démographique du pays à travers le financement et la création de projets artisanaux dans les régions intérieures du pays. Un moyen pour baisser le taux de chômage et la création d'emplois.
D'ailleurs, Moez Belhassine, ministre du Tourisme et de l’artisanat a assuré dans des déclarations aux médias que ''ce domaine vital pour l’économie nationale assure l’emploi de plus de 300 mille artisans et artisanes''.
Et de poursuivre que ''les recettes d’exportation des produits de l’artisanat ont atteint 150 MD en 2022''.
Ces dernières années, le secteur de l’artisanat vit mal sa progression, en raison de la difficulté de trouver des matières premières et l'absence des moyens pour la commercialisation du produit artisanal ainsi que la disparition des apprentis et de la relève transmise de ''père en fils''.
Les souks sont confrontés aux produits de contrefaçon souvent d’origine chinoise qui ont envahi des ruelles authentiques, d'après des experts.
De la chéchia, passant au cuir et des objets décoratifs... le made in Tunisia a été copié par les barons de la contrefaçon. De qualité médiocre et à l’odeur du caoutchouc, ils sont de plus en plus prisés pour leur bas prix, se plaignent nombre d'artisans.
Faire revivre la Médina et transmettre ce savoir-faire de génération à une autre est le rêve de tout artisan passionné de ce métier. Un héritage qui doit être préservé, selon eux.
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