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Ghannouchi : Le peuple tunisien se détourne de la liberté, pour s’intéresser aux acquis économiques

-Au cours d’une conférence organisée à l’occasion du Xe anniversaire de la Révolution de 2011dans laquelle le président du parlement a estimé que l’erreur de l’Etat consiste en son régime mixte parlementaire/présidentiel

1 23  | 12.01.2021 - Mıse À Jour : 12.01.2021
Ghannouchi : Le peuple tunisien se détourne de la liberté, pour s’intéresser aux acquis économiques

Tunisie

AA / Tunis / Marwa Sahli

Le président du Parlement tunisien, Rached Ghannouchi, a souligné, mardi, que le problème et les crises économiques et sociales que traverse le pays ont impacté négativement sur le principal acquis engrangé par la révolution tunisienne, en l'occurrence, la liberté.

Ghannouchi s'exprimait au cours d'une conférence organisée, dans la capitale Tunis, à l'initiative du Centre arabe pour les Recherches et l'Etude des politiques et le Centre des Etudes stratégiques et diplomatiques, en marge du 10ème anniversaire du soulèvement populaire qui avait fait chuter, le 14 janvier 2011, le régime de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011).

Ghannouchi a expliqué cela par le fait que «le peuple ne s'intéresse plus à cette acquis (la liberté) et ne souhaite désormais voir que les réalisations économiques et sociales que l'Etat ne peut plus satisfaire en raison de la crise qu'il traverse».

La Tunisie évolue, depuis un certain temps, au rythme de tensions politiques et sociales et de protestation dans plusieurs provinces pour réclamer l'amélioration des conditions de vie et de la situation économique.

Ghannouchi a estimé qu'il «n'est pas facile de préserver allumée la flamme de la révolution jusqu’à présent, en dépit des tempêtes qui ont ravagé le Monde arabe et de l’atmosphère qui prévaut dans cette région du monde, marquée par une régression des libertés».

«Nous célébrons, aujourd'hui, la révolution qui nous a libérés et qui a éradiqué le totalitarisme tout en renversant un régime oppressif», a-t-il poursuivi.

Ghannouchi, chef du Mouvement Ennahdha (d'obédience islamique et plus grand bloc parlementaire), a relevé que «la société tunisienne a pris le dessus sur l'Etat dans la mesure où les revendications sociales ont placé la barre très haut».

Il a ajouté que «la dépendance à l’Etat est devenu désormais un fardeau et l’Etat se doit de se soulager de cette charge, dès lors qu’il n’est plus raisonnable de continuer sur cette même voie, celle d’assurer le rôle de l’Etat providence qui enseigne et qui soigne, tout en fournissant les moyens de transport et les postes d’emploi».

Ghannouchi a conclu son intervention en estimant que «l'erreur de l'Etat consiste en son régime mixte, présidentiel et parlementaire, de même que la non mise en place d'un système parlementaire entier qui a généré une véritable difficulté dans la gestion du pouvoir».

De son côté, Mehdi Mabrouk, professeur de sociologie à l'université tunisienne et ancien ministre de la Culture, a souligné que « Dix ans après la révolution, un état de schizophrénie aiguë a émergé et sépare l'Etat de la société ».

Il a ajouté que l'Etat «est apparu impuissant et faible pour y faire face (l'état de schizophrénie), à la suite des revendications sociales qui ont envahi le pays au cours des années précédentes et qui se poursuivent encore».

Mabrouk a ajouté qu'une «certaine faiblesse à gangrené les arcanes de l'état au cours des dernières années, à telle enseigne que la classe moyenne n'est plus en mesure d’accueillir et de porter l’Etat, qui a perdu de sa capacité à étendre son influence, compte tenu de l'émergence de nouvelles franges qui protestent de manière à entraver les intérêts de l'Etat et à handicaper les chaînes de production».

Mabrouk a appelé à «rénover les matériaux de l'édification de l'Etat afin de couronner de succès le processus de transition démocratique».

Bien que frappée de plein fouet par une série de crises intérieures, la Tunisie est considérée comme étant la seule expérience démocratique qui a réussi dans les pays arabes qui ont connu, ce qui est communément appelé, les « révolutions du Printemps arabe », dont la Libye, l'Egypte et le Yémen.


*Traduit de l’Arabe par Hatem Kattou

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