
France
AA / Tunis / Salim Boussaïd
Le ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot a qualifié la décision de l'Algérie d'expulser des fonctionnaires français d'"incompréhensible et de brutale".
Barrot s'exprimait aux médias français, en marge d'un déplacement au Calvados, au nord de la France, lundi.
"C'est une décision qui est incompréhensible et brutale", a-t-commenté.
"Le départ d'agents en mission temporaire est injustifiable. Et comme je l'ai fait le mois dernier, nous y répondrons, de manière immédiate, ferme et proportionnée à l'atteinte portée à nos intérêts", a-t-il ajouté.
"C'est une décision que je déplore, parce qu'elle n'est ni dans l'intérêt de l'Algérie, ni dans l'intérêt de la France", a-t-il expliqué.
Cette réaction du chef de la diplomatie française intervient au lendemain de la convocation du chargé d'affaire de l'ambassade de France à Alger, dimanche, par le ministère des Affaires étrangères, lui demandant le "rapatriement immédiat" de quinze agents français, objet de récentes affectations.
Cette décision de l'Algérie "serait intervenue après le constat de manquements flagrants et répétés de la partie française au respect des procédures consacrées en matière d’affectation d’agents auprès des représentations diplomatiques et consulaires françaises en Algérie", a rapporté l'agence algérienne de presse APS.
Alger a justifié sa décision par l'absence "ni de notifications officielles, ni de demandes d’accréditation appropriées comme l’exigent les procédures en vigueur", concernant l'affectation de 15 agents français devant assumer des fonctions diplomatiques ou consulaires.
Vendredi dernier, les autorités algériennes ont également expulsé "deux agents de la DGSI française" qui se sont présentés à l'aéroport d’Alger munis de passeports diplomatiques.
Pour rappel, les relations entre les deux pays se sont dégradées durant l'été 2024, sur fond de reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. En réaction, l’Algérie a retiré son ambassadeur à Paris et le président Tebboune a annulé un déplacement en France, prévu initialement en septembre 2024.
L’emprisonnement, en novembre de la même année, de l’écrivain algéro-français, Boualem Sansal, a compliqué davantage la situation, tout comme le refoulement de migrants en situation irrégulière visés par des obligations de quitter le territoire français, dont l'influenceur algérien Doualemn.
Ces deux affaires ont suscité la colère de plusieurs ministres français, dont Bruno Retailleau (Intérieur) et Jean-Noël Barrot (Affaires étrangères) qui menaçaient de recourir au « rapport de force ».
Les autorités françaises ont même décidé de restreindre l’accès au territoire français de certains responsables algériens pour « défendre les intérêts des Français ».
Un début d'apaisement est ensuite intervenu avec l'entretien téléphonique Macron-Tebboune, à l'occasion de l'Aïd el-Fitr, fin mars 2025, suivi d'une visite à Alger du ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères, le 6 avril dernier, marquant « une nouvelle phase dans une relation d’égal à égal » entre la France et l’Algérie.
Reçu par le chef de l'État algérien, le chef de la diplomatie française avait affirmé que les deux pays avaient « décidé de tourner la page ».
Toutefois, l'arrestation d'un cadre consulaire algérien, début avril à Paris, dans le cadre d'une enquête judiciaire sur la présumée tentative d’enlèvement de l’opposant algérien « Amir DZ », a suscité la colère d'Alger qui n'a pas tardé à exprimer sa contestation auprès de l'ambassadeur de France à Alger, considérant que l'arrestation d'un cadre consulaire à Paris est venue « torpiller » les récents progrès diplomatiques entre les deux pays.
En réaction à cette arrestation, Alger a expulsé 12 fonctionnaires français opérant dans le corps diplomatique en Algérie. Paris en a fait de même.
Les 15 agents français objet de la décision de "rapatriement", seraient affectés dans le cadre du remplacement des fonctionnaires précédemment expulsés.