Afrique

Est de la RDC : «Kadogo», l'incontournable destin des enfants de la guerre?

-Dans l'Est de la République démocratique du Congo, l'horreur a forgé le mental des enfants nés au milieu des guerres et des conflits, poussant un grand nombre d'entre eux à rejoindre les rangs des groupes armés y sévissant pour devenir un "Kadogo"

Nadia Chahed  | 18.09.2017 - Mıse À Jour : 18.09.2017
Est de la RDC : «Kadogo»,  l'incontournable destin des enfants de la guerre? Photo d'archives

Congo, The Democratic Republic of the

AA/Nord-Kivu/Joseph Tsongo

Dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), l'horreur a forgé le mental des enfants nés au milieu des guerres et des conflits, poussant un grand nombre d'entre eux à rejoindre les rangs des groupes armés y sévissant et devenir un "Kadogo" qui venge les siens.

Enrôlés de gré ou de force, ces enfants soldats combattent dans les rangs des groupes armés, portent des armes et des gris-gris, d’autres sont cuisiniers, messagers ou encore espions. Appelés «Kadogo» (petit en Kiswahili local), ces enfants trouvent que "le combat les délivre du poids du passé et leur permet de venger leurs parents", souvent assassinés.

"Je n’ai jamais connu la paix depuis ma naissance…parce que ma famille a été détruite...", confie Nathan, un de ces jeunes qui a servi pendant cinq années les chefs rwandais des FDLR( forces démocratiques de libération du Rwanda) installé depuis 1994 dans l'Est de la RDC.

Et les perspectives de se faire enrôler ne manquent guère dans cette partie du pays où sévissent, aujourd'hui, pas moins 70 groupes armés étrangers et locaux, dont Les FDLR rwandais, les ADF ougandais et les groupes locaux d'auto-défense Mai-Mai.

Si certains enfants ont été enlevés pour rejoindre de force les rangs de ces mouvements armés, d’autres l'ont fait volontairement, un moyen pour eux de se venger: « J'avais 12 ans lorsque j’ai vu mes parents se faire tuer, plus personne pour subvenir à mes besoins. J’ai du coup été contraint d’abandonner l’école et d’aller en brousse où j’ai croisé beaucoup de mes amis du village qui combattent avec des groupes armés », explique Lwanzo ( 17 ans).

Il dit, pour sa part, avoir combattu au sein d'un groupe Mai-Mai dans le sud du territoire de Lubero au Nord-Kivu. Il avait, un peu plus tard, été initié aux pratiques fétichistes qui rendraient les membres de la milice invulnérables aux balles de l’ennemi.

Parce qu’il était devenu très dangereux, on l'appelait « kadogo dawa » qui signifie en Kiswahili (le petit qui traite les gris-gris).

"D'inconscient et naïf, j’étais devenu une machine à tuer", dit-il avec amertume, notant que c'était une sorte de revanche sur ce qu'il a lui même vécu, enfant.

Quelques années plus tard il a été soustrait des mains de ce groupe par l'armée qui l'a intégré dans ses propres rangs

Interrogé par Anadolu sur les motivations et les facteurs d'un tel phénomène, le sociologue Ephrem Tahungula, explique que dans l'Est de la RDC, les enfants ont été fortement confrontés aux scènes macabres de la guerre et des conflits. Fait qui explique selon lui la décision de certains parmi eux de s'engager volontairement dans les rangs des groupes armés.

" tuer n'est rien pour un enfant qui a vu ses parents se faire tuer", indique-t-il, notant qu'intégrer ces groupes permet à ces enfants sans soutien et sans ressources d'avoir une source de revenu et d'avoir une "pseudo famille".

" Ces enfants se laissent convaincre par les promesses chimériques selon lesquelles ils auront à manger, des vêtements et de l’argent pour leur survie", ajoute les spécialiste.

Il estime, par ailleurs, que ce passage dans les rangs des groupes armés, même s'il est bref, ne manque pas de marquer , souvent de manière irréversible, la vie de ces futurs adultes.

"Ces enfants soldats combattent toujours sous l’influence des drogues et prennent part aux tortures et aux meurtres, obéissant aux ordres donnés par leurs chefs", explique-t-il soulignant que ces enfants sont souvent "bourreaux et victimes à la fois", fait qui les rend plus fragiles.

D'ailleurs, nombreux ceux qui continuent à être hantés par cet épisode de leur jeune vie longtemps après avoir quitté les groupes où ils étaient actifs, ayant du mal à réintégrer la vie sociale et leur milieu d'origine, poursuit Ephrem Tahungula.

Le spécialiste estime, à cet effet, qu'une prise en charge ciblée de ces ex-enfants soldats est essentielle aussi bien pour leur propre bien que pour celui de la société.

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