Culture et Arts, Afrique

En salles en Tunisie : « Aïcha »... un voyage initiatique

- Avec « Aïcha », en salles depuis le 22 janvier, le cinéaste tunisien Mehdi M. Barsaoui signe un film au « scénario multicouches », comme il l'a décrit à Anadolu, à travers l’histoire d’une jeune femme en quête identitaire.

Hend Abdessamad  | 04.02.2025 - Mıse À Jour : 04.02.2025
En salles en Tunisie : « Aïcha »... un voyage initiatique

Tunisia

AA/Tunis/ Hend Abdessamad

Après avoir conquis les festivals internationaux notamment La Mostra de Venise, le plus ancien festival de cinéma au monde, et illuminé les écrans des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC), « Aïcha », le deuxième long-métrage du réalisateur Mehdi M. Barsaoui, a rencontré le public tunisien. En salle depuis le 22 janvier dernier, ce drame poignant explore la Tunisie post-révolution à travers le parcours d’une jeune femme en quête de liberté.

Avant de plonger dans les détails de son deuxième long-métrage « Aïcha », le réalisateur tunisien s'est confié, lors d’une interview accordée à Anadolu, sur les défis et la pression qui pèsent souvent sur un cinéaste après le succès de son premier film.


- Le syndrome du deuxième film


Le succès de son premier film « Un fils » a inévitablement généré des attentes élevées, et Mehdi M. Barsaoui n'a pas échappé à la pression souvent associée au « syndrome du deuxième film ». Cependant, le réalisateur tunisien a trouvé un moyen de surmonter cette pression.

En effet, le metteur en scène reconnaît que « la pression après 'Un fils' a été assez importante. 'Un fils' a connu énormément de succès, que ce soit en salle, critique, mais aussi dans les festivals. Et du coup, il y avait énormément d'attentes pour le deuxième ».

La pression a naturellement pesé sur l'artiste lors de l'écriture de Aïcha, après le grand succès de Un fils. Cependant, à un moment donné, Mehdi M. Barsaoui a pris la décision de « s'en défaire consciemment ». N’arrivant pas immédiatement à se libérer de ce poids, il a choisi de « l'utiliser de façon positive » : plutôt que de laisser la pression devenir un frein, il en a fait un moteur. « J'ai décidé de la prendre plutôt positivement, d'en faire un moteur pour aller de l'avant, me remettre en question, revoir mon scénario et ainsi obtenir la meilleure version de Aïcha possible, mon deuxième film », a-t-il expliqué au micro d'Anadolu.


- À la croisée des chemins


Aïcha aborde une multitude de thématiques sociales, mais le réalisateur tunisien a souligné qu’il s’agit avant tout d’un film à la structure complexe, un véritable « scénario multicouches ».

« Le film commence dans le sud de la Tunisie, à Tozeur, où le personnage d’Aya vit une existence monotone, presque insipide. Mais un jour, ou peut-être demain, elle se retrouve confrontée à un choix cornélien : survivre ou mourir. Ce choix radical va bouleverser sa vie, la conduire à Tunis, et l’amener à confronter ses décisions et son destin », a-t-il noté.

Pour Mehdi M. Barsaoui, chaque sujet traité dans Aïcha a été minutieusement étudié. « Le travail le plus difficile a été de trouver le bon équilibre entre les thèmes pour que tout s’enchaîne de manière fluide, authentique et naturelle. L’objectif était d'éviter les clichés et de ne pas tomber dans une écriture plate. Chaque élément du scénario a été remis en question, de manière à offrir la version la plus convaincante et sincère possible », a-t-il poursuivi au micro d'Anadolu.

La quête identitaire traverse tout le film, mais elle va bien au-delà de la simple recherche de soi. « Ce n’est pas seulement la quête d’une identité, mais aussi celle de sa place dans une société en pleine mutation », a-t-il révélé. « Le film explore ce que signifie être un jeune citoyen dans le monde arabe aujourd'hui, dans une société qui se veut moderne mais reste marquée par des tensions profondes. Et surtout, il soulève la question de ce que c'est d'être une femme dans une société encore dominée par le patriarcat », a-t-il mis en lumière.

Enfin, le réalisateur a évoqué le fil conducteur du film : « La quête de soi n’est pas seulement une question d’identité, mais aussi un choix conscient de la place que l’on veut occuper dans une société où les pressions sont nombreuses ».


- Sahara mon amour


Mehdi M. Barsaoui revient sur son lien particulier avec le désert tunisien, qui, à travers ses films, devient un personnage à part entière. Le cinéaste a confié à Anadolu, après une certaine réflexion, ne pas vraiment comprendre l'attirance qu'il ressent pour le sud de la Tunisie, un lieu qui le fascine pourtant profondément. « Peut-être que mon psychanalyste pourrait vous renseigner mieux que moi », ironise-t-il. Toutefois, ce qu'il perçoit clairement, c'est la force cinématographique de ce paysage. « C'est un lieu très cinématographique qui m'inspire énormément », a-t-il réaffirmé, soulignant la beauté brute de ce désert où la terre, la roche, et le ciel semblent s'unir à l'horizon.

En évoquant « Aïcha » , le cinéaste explique que le sud tunisien joue un rôle fondamental dans la narration du film. Le dépaysement, le passage de la ruralité à la ville, du sud vers le nord, est essentiel à l'histoire. « C'est un voyage de deux mondes», précise-t-il, évoquant l'évolution du personnage principal qui, tout en étant confronté à un environnement urbain, doit aussi faire face à de nombreux changements et à un manque de repères. Cette évolution, selon Barsaoui, va au-delà d’un simple déplacement géographique, elle symbolise un voyage intérieur, celui de la quête de soi.

Après avoir signé trois courts-métrages acclamés et primés dans divers festivals internationaux, Mehdi M. Barsaoui fait ses premiers pas dans le long-métrage avec Un fils. Ce film démarre en beauté sa carrière internationale en étant sélectionné en compétition officielle à la Mostra de Venise, où il remporte deux prix prestigieux. Distribué dans une vingtaine de pays, il s'impose sur la scène mondiale, décrochant même le tout premier César pour un film tunisien. Aïcha, son deuxième long-métrage, poursuit cette aventure cinématographique en explorant de nouvelles profondeurs artistiques et sociales.

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