Douzième anniversaire de la Révolution tunisienne: Les acquis du 14 janvier menacés ?
- Un sit-in a été organisé devant le siège du Syndicat national des journalistes tunisiens en présence d'une centaine de composantes de la société civile afin de revendiquer la liberté d'expression qui est menacée .

Tunisia
AA/ Tunis/ Malèk Jomni
La Révolution tunisienne fête, aujourd'hui, son douzième anniversaire, le 14 janvier de chaque année, étant une date qui revêt une symbolique particulière dans la mémoire populaire. Elle marque, en effet, la chute de l'ancien régime de Ben Ali qui a duré plus de 23 ans, bien que le président de la République, Kais Saied, ait décrété, l'année dernière, le 17 décembre, comme une journée fériée pour célébrer cet évènement.
Ce samedi, des partis et des mouvements politiques, des organisations nationales et des membres de la société civile se sont mobilisés et sont descendus dans la rue pour protester contre les mesures entreprises par Kais Saied visant à étouffer les libertés, d'une part et contre la dégradation de la situation socio-économique qui empêche, désormais, les citoyens de mener une vie digne.
Toutes les structures sociales et politiques ont obtenu un accord de la part des autorités régionales compétentes afin d'organiser des manifestations pacifiques conformément à des circuits et à des horaires préétablis afin de garantir l'exercice de la liberté d'expression et le respect des exigences de l'ordre public, selon un communiqué rendu public vendredi par le ministère de l'Intérieur.
Le gouverneur de Tunis, Kamel Feki a autorisé cinq partis à manifester : El-Qotb, le parti des travailleurs, al-Jomhouri, Ettakatol et le Courant démocrate, en plus de l'instance nationale de défense des libertés, tout en rejetant la demande du Front de salut national de manifester devant le Théâtre municipal. C'est à la place de la République qu'il le fera.
Un déploiement sécuritaire très important a été constaté, au niveau de l'avenue Habib Bourguiba et des artères du centre-ville de la capitale Tunis, dès les premières heures de ce 14 janvier 2023. Les routes principales sont barricadées en attendant les manifestants qui commenceront à affluer vers les coups de 10H, heure locale.
- Décret N° 54: La liberté d'expression des journalistes est menacée
Un sit-in a été observé devant le siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) en présence d'une centaine de membres appartenant à la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l'Homme (LTDH), l'Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES) entre autres, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire les slogans suivants: "Non au décret n°54 (SNJT)" , "Tunisiennes révoltées contre les violences et la pauvreté (ATFD)", Pour les droits et les libertés", selon le correspondant de l'Agence Anadolu (AA).
Il convient de rappeler que le Décret-loi n° 2022-54 du 13 septembre 2022 est relatif à la lutte contre les infractions se rapportant aux systèmes d'information et de communication.
Les manifestants se sont, aussitôt, dirigés vers l'Avenue Habib Bourguiba, en passant par l'Avenue de la liberté et la Place de la liberté, en milieu d'une sécurisation extrême de la part des policiers et des forces de l'ordre.
Le président du Syndicat national des journalistes tunisiens, Mahdi Jlassi, a déclaré aux médias que les piliers de l'Etat de droit, qui sont les droits et les libertés, avaient été fondamentalement touchés et surtout en ce qui concerne la liberté d'expression, l'impunité et l'absence de justice.
"Ce sit-in est un rappel des objectifs et des revendications de la Révolution pour barrer un éventuel retour en arrière ou un probable bafouement des libertés acquises. Nous y croyons encore et nous ne baisserons pas les bras!", a-t-il affirmé. Et d'ajouter que le changement de la date de la Révolution du 14 janvier au 17 décembre, par le président de la République, ne posait aucun problème.
"Les deux dates sont très importantes pour l'histoire de la Tunisie ainsi que pour la mémoire collective indépendamment de la politique. Nous l'appelons d'ailleurs "La Révolution 17/14". Nous n'avons aucun problème à traiter avec ceci, même si la première date, d'ailleurs très symbolique, a été retirée de la liste des jours fériés et des fêtes officielles", a-t-il expliqué.
S'adressant au correspondant de l'Agence Anadolu, le président du SNJT a fait savoir que les journalistes en particulier et les citoyens en général sont sujets à différentes menaces.
"A cause du "maudit" décret 54, plusieurs personnes, dont des journalistes et des activistes, sont interpellées, arrêtées ou harcelées. Nul ne peut obtenir justice eu égard l'impunité qui règne", a-t-il souligné, poursuivant: "On est en train d'empiéter sur la dignité humaine et sur les droits individuels, alors que le pouvoir, supposé garantir la sécurité et la liberté pour tous, n'assure malheureusement aucune de ses fonctions".
D'autres slogans ont été levés, à l'occasion de ce douzième anniversaire de la Révolution: "La rue appartient au peuple", "non à l'Etat policier!", "Nous croulons sous la pauvreté et la faim", "A bas le bourreau du peuple", en référence au président Kais Saied, qui semble décevoir la majorité des Tunisiens qui voyaient en lui une lueur d'espoir, le 25 juillet dernier.