Crise en RDC: La "guerre des postes" enlise les négociations (Encadré)

Kinshasa
AA/ Kinshasa/ Pascal Mulegwa
Près de trois mois après la signature de l’accord politique entre le pouvoir et l’opposition en République démocratique du Congo, le blocage persiste et les modalités d'application dudit document peinent à être adoptées.
A l’origine, « le partage du gâteau » comme aiment à dire certains, en allusion aux postes à pourvoir au sein des institutions pouvant conduire à l’organisation des élections « en fin d’année».
- Intérêts partisans
Signé le 31 décembre, à l’issue des négociations entreprises par les évêques de l’Eglise catholique, après un premier round parrainé par l’Union Africaine [de septembre à Octobre 2016], le dialogue politique se heurte à des difficultés ayant trait au partage « partage des postes », ont alerté, jeudi, les médiateurs. Ces derniers ont réclamé, lundi dernier, la signature dudit accord le 27 mars.
« Il y a des intérêts partisans et égoïstes qui priment sur l'intérêt supérieur du pays […] Je crois qu'il appartient au peuple de leur signifier ses mauvaises humeurs par rapport à ce genre de comportements, où de petites questions qu'on pouvait facilement régler, sont traînées en longueur comme si la souffrance du peuple ne leur disait rien », a déclaré à Anadolu l’archevêque Fridolin Ambongo, vice-président de la conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), assurant la médiation.
« Nous sommes étonnés de nous voir tomber dans le quatrième mois sans finalisation de la médiation, à causse d'heurts autour de la primature (Premier ministère), du conseil national de suivi de l’accord (CNSA), du reste des ministères, etc… Je me demande s’ils veulent réellement aller aux élections », enchaîne-t-il. Selon la médiation, la présidence du CNSA a refait surface, après la mort le 1er février dernier de l’opposant Etienne Tshisekedi, qui devait présider cette institution.
Les colistiers et disciples de Tshisekedi ont vite revendiqué ce poste auquel Etienne Tshisekedi avait été désigné « à titre personnel, vu sa personnalité historique », selon le camp présidentiel qui exige un nouveau consensus de toutes les parties.
Une frange de l’opposition dirigée par Vital Kamerhe sorti troisième à la présidentielle de 2011, et le front commun pour le respect de la Constitution, une plateforme dirigée par la députée, Eve Bazaiba, revendique également ce poste.
Des désaccords persistent également sur la répartition des portefeuilles-clés des ministères des Affaires étrangères, de l’Intérieur, de la Défense et de la Justice du gouvernement de transition attendu. Le mode de désignation du premier ministre demeure le point central de blocage, après plusieurs tractations teintées de volte-face récurrentes.
- Tractations et danger imminent
Le camp présidentiel exige la proposition à Joseph Kabila de trois candidats issus du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, pour le poste de premier ministre. Mais, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), principal parti d’opposition en RDC, ne l'entend pas de cet oreille.
Dans une déclaration jeudi dernier à Anadolu, Augustin Kabuya, porte-parole de l’UDPS, a affirmé que son parti réagira, en cas de non signature de l’accord sur l’arrangement particulier, lundi. Cette date a été fixée par les évêques catholiques.« Joseph Kabila n’a plus de légitimité, il n’en aura que s’il applique l’accord et donc s’il ne l’applique pas vite, il reviendra au peuple de trancher », a-t-il lâché.
Un autre responsable du parti, interrogé par Anadolu, a affirmé que le parti [UDPS], pouvait même « appeler les populations à des manifestations populaires » pour exiger le départ de Joseph Kabila.
Depuis la réélection contestée de Kabila en 2011, à l’issue d’un scrutin taxé de "fraudes massives et d’irrégularités", la RDC traverse une crise politique qui s’est aggravée par la non tenue des élections, dont la présidentielle initialement prévue en novembre 2016.
Ne pouvant briguer un troisième mandat, en vertu de la Constitution et du dernier accord politique, Joseph Kabila, 46 ans, totalise 16 ans de règne. L’opposition et la société civile lui reprochent de manœuvrer, afin de se maintenir au pouvoir, en opérant un glissement du calendrier électoral.