Burundi: Les pêcheurs de Cibitoke se détournent du poisson pour l'Escargot
Depuis que des Chinois, grands consommateurs d'escargots, se sont installés à Cibitoke, dans le nord-ouest du Burundi, ces mollusques revendus à un dollar le kilo, attirent de plus en plus les pêcheurs de la place

Burundi
AA/Bujumbura/Yvan Rukundo
Les pêcheurs du lac "Dogodogo", dans le nord-ouest du Burundi, ne s'intéressent plus au poisson ou peu, leur attention est désormais tournée vers une espèce, autrement plus précieuse et plus savoureuse assurent-ils: L'escargot.
Depuis que des Chinois se sont installés dans le chef lieu de Cibitoke, en 2014, l'escargot n'est plus ce laissé pour compte qu'on regarde à peine au fond de ses filets mais l'objet de toutes les convoitises, confient à Anadolu des pêcheurs de la place.
Expatriés travaillant dans des projets d'infrastructure au Burundi, ces Chinois sont particulièrement férus de mollusques, souligne Anastasie Nyabenda, un pêcheur d'une quarantaine d'années. "Avant on voyait les escargots dans les champs de riz, dans les ruisseaux et on ne soupçonnait guère qu’un jour, ils deviendront un gagne-pain juteux", témoigne-t-il à Anadolu.
"Les escargots c'est de l'or caché sous les eaux", s'extasie un autre pêcheur.
D'ailleurs depuis qu'ils ont découvert les escargots, les pêcheurs de "Dogodogo" passent de plus en plus d'heures à la pêche, fait observer Parfait, un jeune pêcheur qui reconnait que c'est la "motivation pécuniaire" qui explique cet engouement.
Un kilo d'escargot est vendu à un dollar, précise pour sa part, Christophe Manirambona, un autre jeune pêcheur rencontré sur place. Et comme la pêche est quotidienne, il peut gagner jusqu'à 50 dollars par semaine, affirme-t-il à Anadolu, satisfait.
Le prix d'un kilogramme d'escargots tourne autour de 2 USD. Pendant la saison sèche, du mois de juin à septembre, le prix grimpe jusqu'à 3 USD, en raison de la faible production et de la forte demande, soit le prix moyen d'un kilogramme de poissons.
Oscar Kabura, la soixantaine avec au moins une vingtaine d'années de pêche à son actif, souligne qu’il n’est guère aisé de capturer les escargots. "Il y a deux moyens de les attraper soit en ramassant ceux qui tombent de nos filets soit en les cherchant dans les eaux du lac et c'est le plus difficile", indique-t-il.
Embarqués à bord de pirogues en bois, les pêcheurs parcourent les eaux du lac des dizaines de fois, matin et soir, bravant tous les dangers, notamment celui d'être piqué par un serpent, ajoute-t-il.
Toutefois le résultat est bien tentant, reconnait-t-il ajoutant que la vente d'escargots lui a permis de s'acheter un vélo neuf, le mois dernier, mais surtout "d'améliorer ses revenus" tout en subvenant aux besoins de sa famille et aux frais de scolarité de ses petits-enfants.
Si la majorité des habitants de cette localité n'ont toujours pas goûté à l'escargot, Oscar Kabura dit s'être aventuré et même avoir été "impressionné" par la saveur de cette chair.
"C'était au début de l'année 2015. Un jour, je livrais des escargots à mes clients chinois installés à Cibitoke, ils m'ont alors invité à déguster leur déjeuner et je reconnais avoir été agréablement surpris par ce goût nouveau", raconte-t-il.
Depuis, Oscar est doublement motivé quand il part au ramassage d'escargot, d'une part pour améliorer ses revenus et de l'autre pour son propre plaisir et celui de ses proches, également initiés.
Oscar regrette toutefois de ne pas avoir assisté à la préparation des escargots par ses clients chinois.
Ce qui ne l'a pas empêché de cuisiner l'escargot chez lui. "J'ai procédé comme s'il s'agissait de poisson ou de Ndagala (petits poissons du lac Tanganyika qui traverse le Burundi), bien que le goût n'ait pas été le même que chez les Chinois, accompagnés de pâte manioc, les escargots étaient délicieux", explique-t-il à Anadolu.
"Depuis les escargots font partie de nos plats préférés qu'on déguste avec les amis et les membres de la famille", ajoute-t-il encore.
Constatant le succès de l'escargot aussi bien chez les Chinois que chez les Burundais, les pêcheurs de Cibitoke pensent, déjà à fructifier leur activité à travers l'exportation. ''Nous allons voir comment exporter nos produits en République démocratique du Congo (RDC) et au Rwanda, voisins'', déclare Bosco un autre jeune pêcheur à Anadolu, convaincu que l'escargot peut lui ouvrir les portes d'un succès assuré.
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