Burundi : Danse avec les "filles du ciel"
L’art de communiquer avec les abeilles a été transmis à Cyprien Miburo de père en fils.

Bujumbura
AA/ Bujumbura/ Yvan Rukundo
L’abeille est à Cyprien Miburo ce que la guitare est au musicien. Cet apiculteur burundais sait danser avec ses "amies", offrant un spectacle hors pair à ses visiteurs. La quarantaine et père de trois filles, le natif de Kayanza, dans le nord du Burundi et ses abeilles s’embrassent et se séparent, sous un ciel bleu et des regards d’une assistance ébahie.
« Incroyable! De la magie! », Crient certains spectateurs ayant déjà fait l’expérience de la piqûre d’abeille. « Je sais comment apprivoiser mes abeilles. Les piqûres, j’en ai eu suffisamment. Aujourd’hui, je vis en parfaite communion avec mes insectes magiques. Je suis leur serviteur, elles le savent et se réjouissent à ma vue. Ma gestuelle les enchante, du coup j’éprouve du plaisir à danser avec elles », témoigne l’ami des abeilles, comme aiment à l’appeler ses connaissances dans le village.
L’art de communiquer avec "les filles du ciel" lui a été transmis par son père. C’est à l’âge de 13 ans qu’il a commencé à accompagner son maître apiculteur, à la recherche d’insectes magiques aux fins fonds de la forêt et dans les troncs d’arbres.
« La belle aventure a commencé quand j’ai goûté pour la première fois au miel. J’avais environ 10 ans », se souvient-il. Depuis, chaque fois que son père partait à la recherche d'abeilles, il le suivait en cachette. Car, explique-t-il, son parent craignait pour sa sécurité dans une brousse sauvage. « C’est à l’âge de treize ans qu’il a accepté que je l’accompagne, m’informant progressivement sur son activité, notamment le comportement et les habitudes des insectes», dit-il, soulignant qu'il a finalement réalisé que, sans provocation, les abeilles sont pacifiques.
Le monde des abeilles, le jeune apiculteur l’a très bien expérimenté et en sait, bel et bien, tous les secrets.
Miburo doit, par ailleurs, sa réussite sociale à ses abeilles : « Grâce à l’apiculture, j’ai pu payer la dot, fonder mon foyer, construire une maison en tôles et acheter plusieurs vaches. Je n’ai même pas de soucis, aujourd’hui, à payer les frais scolaires de mes enfants », se réjouit-il.
L’amoureux des abeilles dispose actuellement de plus de 1000 niches modernes, fabriquées à base de planches et couvertes de tôles.
« Ces niches modernes donnent entre 50 et 60 kg de miel par an et par unité contre 10 à 15 kg pour les niches classiques », affirme-t-il, précisant qu’1 kg de miel se vend à 3.5 dollars.
Mais Miburo ne se limite pas au miel comme source de revenu, il sait rentabiliser d’autres dérivés, telle la cire. Il en fait des bougies. La technique est simple: « On met la cire dans une casserole et on la chauffe durant une trentaine de minutes. Puis, on attend que le liquide se refroidisse pour ensuite placer une cordelette en coton ou des mèches à bougie », décrit l’apiculteur. Il produit au moins 1000 bougies par semaine, qu’il vend, ensuite, à 2 dollars américains par pièce.
Ces bougies éclairent ses siennes et celles d’un Burundi déchiré par une crise politique et sociale.