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Burkina Faso: Le général de brigade Gilbert Diendéré «assume» le putsch de 2015

- Mais nie l’avoir « commandité, planifié, organisé ni exécuté »

Lassaad Ben Ahmed  | 27.11.2018 - Mıse À Jour : 27.11.2018
Burkina Faso: Le général de brigade Gilbert Diendéré «assume» le putsch de 2015

Burkina Faso

AA / Ouagadougou / Wendyam Valentin Compaoré

A la barre du Tribunal militaire de Ouagadougou, lundi jusqu’à une heure tardive, le Général de Brigade Gilbert Diendéré a déclaré avoir « assumé » le putsch de septembre 2015 mais nié l’avoir « commandité, planifié, organisé, exécuté ».

« Je n’ai ni commandité, ni planifié, ni organisé, ni exécuté ce que d’aucuns ont appelés putsch », a déclaré lundi le général de Brigade Gilbert Diendéré, à l’entame de son audition devant le tribunal militaire de Ouagadougou.

« J’ai assumé une situation donnée sur conseils des médiateurs (l’ancien président Jean-Baptise Ouédraogo et Monseigneur Paul Ouédraogo) et avec l’accord de la hiérarchie militaire qui a avoué son échec à gérer la crise », a poursuivi l’ex-patron de fait du régiment de sécurité présidentiel (RSP).

Le général Diendéré a expliqué qu’après l’arrestation des autorités de transition, une réunion qui a regroupé la hiérarchie militaire et deux personnalités que sont l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo et l’archevêque de Bobo-Dioulasso Paul Ouédraogo, s’est tenue.

A l’issue de cette réunion, ces derniers se sont rendus au camp Naba Koom 2, afin de rencontrer le personnel du RSP pour trouver une solution à la crise.

Sur place, « face à l’intransigeance du personnel du RSP et face à la vacance du pouvoir constatée par les médiateurs, il a été recommandé que la gestion du pouvoir soit assumée par l’armée », a expliqué le général Diendéré.

Une décision que « la hiérarchie n’a pas contestée » selon Diendéré, mais a plutôt « décliné l’offre », et l’a justifiée par le fait qu’elle n’a pas été «informée au départ du putsch et qu’elle n’allait pas pouvoir gérer la situation».

Face à cette position de la hiérarchie militaire, Diendéré a affirmé qu’il s’est vu « obligé de prendre les choses en main afin, selon lui, de ne pas laisser la gestion du pays « à ceux qui ont commencé l’action (les sous-officiers), car cela n’allait pas être une bonne chose ».

« J’ai mis en place le Conseil National de la Démocratie (CND) avec l’onction de la hiérarchie militaire et les promesses de soutien pour éviter les affres d’une guerre civile et l’invasion des terroristes », a-t-il expliqué.

Sa démarche «a été incomprise par une partie de la population », a affirmé le général, et ce, à cause du « comportement machiavélique de certaines organisations de la société civile (OSC) englutinés auprès du Premier ministre Zida qui leur servait des fonds en vidant les caisses de l’Etat», a-t-il laisser entendre.

«J’ai décidé d’abandonner - au regard des violences, des morts- de remettre le pouvoir et de me mettre à la disposition de la justice de mon pays», a-t-il expliqué.

Si le général de Brigade nie avoir planifié et exécuté le putsch, il affirme néanmoins qu’un contexte général l’a favorisé en précisant que «le personnel du RSP qui a fait le putsch n’a pas avalé de tramadol ni bu de l’alcool ».

Concernant le contexte général qui a favorisé le putsch, le général de Brigade Diendéré pointe du doigt l’ex-premier ministre le Lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida.

Selon ses dires, «après s’être fait chef d’Etat puis Premier ministre, suite au coup d’Etat, Yacouba Isaac Zida en violation de la charte adoptée dans des conditions illégales, a essayé de prolonger la transition».

Et pour atteindre ce but, l’ancien premier ministre a voulu contrôler quatre entités que sont «l’administration publique, les finances, la rue et l’armée» selon le général Gilbert Diendéré.

D’après lui, Zida a voulu mettre à la retraite tous les officiers plus gradés que lui, à l’exception de ceux qui étaient avec lui au gouvernement et au CNT (l’assemblée de la transition), mais s’est ravisé face aux conseils des ambassadeurs de France et des Etats unis.

«Son désir de se mettre au-dessus de tous, l’a amené à adopter contre l’avis de la hiérarchie militaire, une loi sur le statut de l’armée », qui permettait à un lieutenant-colonel de devenir général de division, a-t-il affirmé.

Le général Diendéré a expliqué que l’ex-Premier ministre Zida a distribué des sommes d’argent aux soldats du RSP afin de pouvoir contrôler le corps.

« Comme il perdait le contrôle du corps, malgré ces sommes d’argent, il a essayé de le dissoudre, sachant qu’une dissolution brusque allait créer des troubles et faire reporter les élections », a-t-il expliqué.

C’est dans une salle des banquets bondée de monde que s’est déroulée cette première journée de l’audition du général de Brigade Gilbert Diendéré.

Une journée au cours de laquelle, le Général Diendéré a consacré son audition au contexte qui a prévalu avant le putsch de septembre 2015, soit la gestion de la transition par le duo Miche Kafando-Yacouba Isaac Zida.

Le général de Brigade est poursuivi pour cinq chefs d’accusations pour lesquels il a plaidé non coupable.

Il s’agit d’attentat contre la sûreté de l’Etat, meurtre de 13 personnes, coups et blessures volontaires sur 42 personnes, incitation à la commission d’actes contraires à la discipline militaire et trahison.

L’interrogatoire du général Gilbert Diendéré se poursuit mardi au Tribunal de Ouagadougou, ou l’accusé va aborder son action dans le coup d’Etat.

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