Bénin: introduction de l’anglais dans le cycle primaire de l'enseignement public
Plus de 200 écoles pilotes sur l’ensemble du territoire sont retenues pour l’apprentissage de la langue anglaise dès cette rentrée

Benin
AA/ Cotonou (Bénin)/ Serge David Zouémé
Le Bénin décide officiellement d'introduire la langue anglaise dans le cycle primaire de l'enseignement public, dès la rentrée scolaire du 18 septembre. « Après sept ans d'études sur l'enseignement dans les premier et deuxième cycles du secondaire, les apprenants ne sont pas en mesure de parler couramment l'anglais. L'âge étant un facteur très important dans le processus d'acquisition d'une langue. Et les autorités béninoises ont décidé d'introduire l'anglais au primaire dès la rentrée scolaire », a déclaré au correspondant d’Anadolu, le ministre béninois des Enseignements maternel et primaire, Salimane Karimou, pour expliquer la décision du gouvernement.
En effet, le Conseil des ministres réuni en session ordinaire le mercredi 2 août 2017, sous la présidence du chef de l’Etat, Patrice Talon, et après analyse du rapport sur l’évaluation des besoins en matière d’enseignement de l’anglais en République du Bénin, a chargé les ministres des trois niveau de l’enseignement (primaire, secondaire, supérieur) de prendre les dispositions administratives, académiques et logistiques nécessaires en vue de l’introduction, pour une phase pilote et à titre expérimental, des cours d’anglais dans l’enseignement primaire dès la rentrée scolaire 2017-2018.
Profiter des opportunités
Selon le compte rendu du Conseil, ‘’ l’initiative du gouvernement, d’introduire l’anglais dans le système éducatif l’enseignement primaire, fait partie de sa démarche de faire profiter notre pays de toutes les opportunités, aussi bien sous-régionales, régionales que mondiales, vitales pour son développement intégré et durable’’.
En clair, dès la rentrée scolaire 2017-2018 annoncée pour le 18 septembre sur l’ensemble du territoire, les écoliers du cycle primaire pourront déjà commencer par se bercer et s’instruire dans cette langue universelle.
« Les plus jeunes apprenants dégagent cette capacité d’adaptation et d’apprentissage ; ils développent une disponibilité mentale et psychique pour assimiler et s’approprier une langue étrangère », a confié le ministre, visiblement très sûr du choix porté sur les écoliers du cycle primaire.
S’agissant de l’application de cette décision pour la phase expérimentale, le ministre explique que « la cartographie scolaire béninoise est subdivisée en trente-six zones académiques. Dans chaque zone académique, cinq à six écoles pilotes seront retenues, soit plus de 200 écoles sur l’ensemble du territoire.
En ce qui concerne le corps enseignant qui sera chargé de cette tâche, "nous allons lancer un appel à concurrence pour recruter parmi les enseignants qui exercent déjà, ceux qui sont titulaires d'une licence ou d'une maîtrise d'anglais, indépendamment de leurs diplômes professionnels de Capes ou de Bapes. »
Quant au contenu de la formation, le ministre précise que les pédagogues et planificateurs de l’éducation associés sauront définir l’enseignement de façon à l’arrimer au potentiel des enfants.
Maoudi Johnson, planificateur de l’éducation, ex-Secrétaire technique permanent du Plan décennal de développement du Secteur de l’Education au Bénin (Stp-PDDSE), fait savoir à Anadolu que ‘’ l'Etat ne fait qu'appliquer la Loi n° 2003 – 17 du 11 novembre 2003, portant orientation de l’éducation nationale en République du Bénin. Cette loi stipule dans son article 8 que l’enseignement est dispensé en français, en anglais et en langues nationales’’.
Selon lui, dans un monde quasi anglophone, où notamment les ordinateurs et la science dans son ensemble parle la langue de Shakespeare, ‘’il devient impérieux dans un souci de véritable compétence et de compétitivité, non seulement de rehausser le niveau de nos apprenants, mais aussi de leur donner une chance face à ce monde’’.
Un manque à combler
Il a regretté que les méthodes d’enseignement utilisées jusque-là dans les cycles (I et II) du secondaire soient très disparates et pas toujours assez efficaces et surtout peu pérennes pour permettre à l’apprenant de cultiver l’aspect oral de la langue anglaise.
« Ce qui interpelle ici, c'est surtout de repenser l'éducation du jeune béninois à travers un cadre bilingue méthodique, afin de lui offrir plus de chance de s'intégrer dans la mondialisation et de promouvoir le rapport formation/emploi », a-t- il déclaré au correspondant d’Anadolu, indiquant qu’au Bénin, le rapport entre français et anglais serait dans une proportion de 85% contre 15%.
Il recommande, pour conclure, la mise en place d’une politique nouvelle et un mécanisme nouveau. Du côté des parents d’élèves, on applaudit cette décision du gouvernement qui va accroître, espère-t-on, les chances d’insertion professionnelle des apprenants. « Nous accueillons positivement l’apprentissage de l’anglais dès la base, parce qu’il permettra à nos enfants de développer de grandes capacités d’assimilation et de s’ouvrir plus tard au monde pour saisir facilement les opportunités », a déclaré à Anadolu, Pierre Azon, administrateur de banque et parent d’élève.
Au niveau pratique, dans le système éducatif public actuel au Bénin, l’enseignement de l’anglais commence à partir de la 6ème année collège. A l’Université, il est aussi créé un département d’anglais, où l’étudiant peut apprendre prioritairement la langue anglaise et obtenir une Licence (Bac + 3) ou une Maîtrise (Bac + 4) en anglais.
En revanche, dans le privé, il existe déjà des écoles bilingues, où on enseigne l’anglais dès le primaire, mais à un coût prohibitif.
Le Bénin, pays francophones de l’Afrique de l’Ouest avec une population faiblement instruite, peut-il virer en un pays anglophone suite à cette décision, ou est-ce juste une diversification éducative pour ouvrir de meilleures perspectives aux jeunes apprenants?
Il y a matière à méditation...