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Algérie-France : Des relations en dents de scie

- Après une longue brouille diplomatique entre les deux pays, Emmanuel Macron arrive ce jeudi 25 août à Alger, dans le cadre d’une visite officielle de trois jours, à l’invitation de son homologue algérien, Abdelmadjid Tebboune.

Fatma Bendhaou  | 25.08.2022 - Mıse À Jour : 26.08.2022
Algérie-France : Des relations en dents de scie

Algeria

AA/Alger/Aksil Ouali

Le Président français, Emmanuel Macron, arrive ce jeudi 25 août à Alger, dans le cadre d’une visite officielle de trois jours, à l’invitation de son homologue algérien, Abdelmadjid Tebboune. Cette visite est la deuxième du genre pour le locataire du Palais de l’Elysée en tant que chef de l’Etat, après celle effectuée en 2017 où il a eu une courte rencontre avec l’ancien président algérien, aujourd’hui décédé, Abdelaziz Bouteflika qui était alors très affaibli par la maladie.

Cette nouvelle visite intervient après une longue brouille diplomatique, provoquée par les propos, en automne 2021, d’Emmanuel Macron sur l’histoire de l’Algérie et son régime qualifié de « politico-militaire dur ». Une grave crise diplomatique s’est alors installée entre Alger et Paris. La tension a atteint son paroxysme en novembre lorsque le Président Algérien a décliné une invitation de son homologue français pour prendre part à la conférence internationale sur la Libye, tenue dans la capitale française.

Il a fallu attendre le début du mois de décembre 2021 pour voir cette grisaille d’automne se dissiper pour permettre un nouveau réchauffement. Cet épisode résume à lui seul l’évolution en dents de scie des relations entre les deux pays. Des rapports, dont la nature change selon l’identité et la couleur politique du président français.

Durant les deux dernières décennies, l’Algérie et la France étaient sur le point de conclure un traité d’amitié durant la présidence de Jacques Chirac, avant de sombrer dans « je t’aime moi non plus » avec Nicolas Sarkozy, pour revenir au rapprochement avec François Hollande. Souvent, l’apaisement n’est que d’une courte durée.

Les deux pays n’arrivent toujours pas, soixante ans après l’indépendance de l’Algérie, à normaliser leurs rapports. Pourquoi Alger et Paris peinent-ils à tourner la page ? Quels sont les facteurs aggravants de ces crises à répétition ?


- « Amour-haine ! »

Interrogé par l'Agence Anadolu, le politologue algérien Rachid Tlemçani compare les relations algéro-françaises à celle d’un couple où, souvent, « l’amour et la haine s’enchevêtrent ». « Quand on a en charge des enfants et un patrimoine matériel ou financier, vivre ensemble devient problématique. C’est le cas aussi pour les pays, dont les rapports évoluent aussi sous les contraintes de la mondialisation et de la géopolitique régionale qui pèsent sur leurs politiques internes », souligne-t-il.

Selon lui, « il y a plusieurs acteurs en jeu des deux côtés de la méditerranée ». « Leurs intérêts sont énormes. Ils sont commerciaux, financiers, culturels et géopolitique. Ces dernières années, la question mémorielle a émergé aussi comme un iceberg. Pour apaiser les relations, l'Algérie exige des excuses sur les crimes coloniaux, excuses que le gouvernement français ne peut pas faire au regard de l’extrême droite, un courant politique populiste prenant de l’influence à chaque élection alors que la gauche classique est en désarroi », explique-t-il.

Alger et Paris, ajoute-t-il, « continueront à vivre dans une conflictualité politicienne mesurée tant que la génération de la guerre d’Algérie restera aux manettes dans les secteurs stratégiques de l’économie ». Et de noter : « Les nouvelles élites et les générations des réseaux sociaux n’ont pas des perceptions irréconciliables de l’histoire en opposition aux élites traditionnelles ».


- « Des intérêts économiques stratégiques »

Soulignant le poids considérable du dossier mémoriel dans les relations algéro-françaises, l’historien algérien, Rabah Lounici, relève, dans une déclaration à AA, l’avènement d’un autre facteur. Il s’agit, indique-t-il, de la volonté française de préserver ses intérêts économiques stratégiques en Algérie et en Afrique.

« Pour ce faire, la France n’hésite pas à faire dans le chantage sur plusieurs autres questions. En revanche, les autorités algériennes tentent de diversifier l’économie du pays et de s’ouvrir sur d’autres partenariats », note-t-il.

L’Algérie et la France sont, estiment d’autres experts, condamnées à « cultiver une bonne entente ». « En choisissant Alger comme destination pour le début de son mandat, le Président Macron montre que l'Algérie est en train de revenir sur la scène régionale et internationale. L’Algérie ne peut pas non plus faire l’impasse sur une bonne entente avec Paris », relève Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève, dans une déclaration à des médias français.

*Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que leur auteur et ne reflètent pas forcément la ligne éditoriale de l'Agence Anadolu.

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