Politique, Afrique

Algérie- Ahmed Ouyahia, "l’indéboulonnable" revenant à la Primature

- Ayant occupé le poste de Premier ministre ou de Chef de gouvernement à trois reprises auparavant , Ahmed Ouyahia, , vient remplacer "au pied levé" un Abdelmajid Tebboune qui n'aurait passé que moins de 80 jours à la tête du gouvernement algérien.

Esma Ben Said  | 16.08.2017 - Mıse À Jour : 16.08.2017
Algérie-  Ahmed Ouyahia, "l’indéboulonnable" revenant à la Primature

Algeria

AA/Alger/Karim Kabir

Ahmed Ouyahia, nommé mardi comme Premier ministre en remplacement d’Abdelmadjid Tebboune est une figure majeure du système politique algérien de ce dernier quart de siècle.

Véritable commis de l’Etat, comme il se définit lui-même, Ahmed Ouyahia est l’un des rares, sinon le seul homme politique algérien qui a hérité du poste de Chef de gouvernement et de Premier Ministre.

Nommé une première fois comme Premier ministre en 1995, sous le règne de l’ancien ministre de la Défense, Liamine Zeroual, alors que le pays était confronté à une guerre civile née de l’arrêt du processus électoral, quelques années plutôt, qui a vu la victoire du "Front Islamique du Salut" (FIS, formation d'obédience islamique), Ahmed Ouyahia, qualifié alors d’ «éradicateur»,-homme faisant partie du clan favorable à une guerre sans merci contre le FIS par opposition aux réconciliateurs qui plaidaient une solution politique- est reconduit en 2003 en remplacement d’Ali Benflis, qui s’est présenté candidat à la Présidentielle de 2004 contre celui dont il était le directeur de campagne : le président Bouteflika (en poste depuis 1999).

Ecarté en 2006, il revient de nouveau deux années plus tard pour rester quatre longues années, soit jusqu’à 2012, avant de rejoindre la Présidence de la république en qualité de chef de cabinet.

Cette longévité et ces retours répétés dans les rouages du pouvoir ont une explication : l’homme est connu pour sa « discipline » vis-à-vis du "Système", sa « poigne » et sa capacité à affronter les situations même les plus compliquées.

Lorsque durant les années de guerre civile, le FMI impose des mesures d’austérité à l’Algérie, c’est lui qui est chargé de les appliquer.

Dans une entreprise présentée alors comme de moralisation de la vie publique, il envoie en prison plusieurs dizaines de cadres d’entreprises à telle enseigne qu’on l’a affublé du vocable : «l’homme des sales besognes ».

Et lui-même n’hésite pas à se définir comme l’homme du « sale boulot ». Même si aujourd’hui il dirige le rassemblement national démocratique (RND) (parti libéral), deuxième parti à l’assemblée avec 100 députés, Ahmed Ouyahia, 67 ans, originaire de la Kabylie, région montagneuse et berbérophone, à 100 km à l’Est d’Alger, n’est pas un politique à proprement parler. Il a fait ses classes dans la diplomatie.

Brillant énarque, il est affecté en 1981 comme conseiller aux Affaires étrangères à l'ambassadeur d'Algérie en Côte d'Ivoire, puis en 1984, à la direction de la Mission permanente de l'Algérie aux Nations unies à New York.

De 1988 à 1989, il est nommé co-représentant algérien au Conseil de sécurité des Nations unies, puis chargé d'études au cabinet du ministre des Affaires étrangères avant de devenir directeur général du département Afrique du même ministère.

Nommé ambassadeur au Mali en 1992, il entreprend la médiation entre le gouvernement central malien et le mouvement Azwad. Il accomplit une mission similaire, au nom de l’OUA, en 1999 dans le conflit qui opposait alors l’Erythrée et l’Ethiopie.

Réputé libéral et proche de l’ancien patron des services de renseignements, Ahmed Ouyahia entretient de bons rapports avec les hommes d’affaires contrairement à son prédécesseur qui, dès sa nomination en juin dernier, avait proclamé son ambition de « séparer l’argent de la politique ».

D’ailleurs beaucoup d’observateurs soutiennent qu’Abdelmadjid Tebboune paye les frais de son bras de fer avec le chef de la puissante organisation patronale, le forum des chefs d’entreprises (FCE), Ali Haddad, un homme qui a fait fortune dans le bâtiment et proche de Said Bouteflika, frère du président algérien et qu’il a humilié en juillet dernier lors d’une cérémonie à laquelle il l’a empêché d’y assister.

En plus de préparer une rentrée sociale difficile, Ahmed Ouyahia devrait aussi préparer les élections locales prévues en novembre prochain, dernier rendez-vous avant la présidentielle de 2019 pour laquelle on lui prête des ambitions dissimulées.

Mais son retour au premier plan ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique. « Ahmed Ouyahia est l’homme le mieux placé (pour le poste, NDLR). Il a les qualités et les capacités pour gérer la situation dans laquelle nous sommes et pour faire face aux difficultés que nous rencontrons actuellement sur le plan économique et social.

À mon avis, c’est un choix qu’on aurait pu déjà faire il y a deux ou trois ans », a réagi l’ancien président de l’assemblée, Abdelaziz Ziari, issu du FLN, le parti du président.

«On n’a rien compris à ce qui se passe au sommet de l’État. Pour la première fois, un Premier ministre est nommé, présente le plan d’action qui a été adopté par le Parlement avant d’être limogé trois mois plus tard. Il est remplacé par un ancien Premier ministre qui a été limogé en 2012 de la même manière lorsqu’il a annoncé que le pouvoir a été malmené par la mafia politico-financière.

Aujourd’hui, on constate que tout est lié à l’échéance de 2019. Soit, c’est le nouveau premier ministre qui va organiser la succession, soit c’est lui qui sera candidat. Ce n’est pas de cette manière qu’on règle les problèmes vécus par les Algériens sur le plan politique, financier ou social.

Le climat est exécrable et on a ramené la personne idéale, celui qui s’est auto-qualifié l’homme des sales besognes », a réagi, de son côté, Lakhdar Benkhelaf, cadre et député de l’union « Al Adala, Ennahda, El Bina » (tendance d'obédience islamique) au journal online TSA (Tout sur l’Algérie).

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