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Abidjan – Présidentielle 2020 : Polémique autour d’une candidature controversée d’Alassane Ouattara

Nadia Chahed  | 12.06.2018 - Mıse À Jour : 12.06.2018
Abidjan – Présidentielle 2020 : Polémique autour d’une candidature controversée d’Alassane Ouattara

Abidjan
AA / Abidjan / Fulbert Yao

Le chef de l’Etat ivoirien, Alassane Ouattara, au pouvoir depuis mai 2011, n’exclut pas de briguer un troisième mandat de 5 ans lors de la prochaine Présidentielle de 2020.

En attendant ce scrutin, l'idée d’un troisième mandat évoquée par Ouattara, dans une interview parue le 3 juin dans une revue panafricaine, suscite des réactions mitigées, tant parmi les dirigeants politiques de l’opposition, que dans le camp de Ouattara lui-même et des juristes.

Alassane Ouattara a-t-il le droit, selon la Constitution de postuler à la Présidentielle de 2020? Le président estime que si !

Il se réfère à la nouvelle Constitution adoptée avec 93,42% des suffrages exprimés lors du scrutin référendaire du 30 octobre 2016 et dont le taux de participation était de 42,42%.

Ouattara considère que par l’adoption de la nouvelle Constitution, tous les compteurs sont remis à zéro et il peut, donc, se porter candidat comme tout autre candidat qui n’a jamais était à la présidence.

«La nouvelle Constitution m’autorise à faire deux mandats à partir de 2020. Je ne prendrai ma décision qu’à partir de ce moment-là, en fonction de la situation de la Côte d’Ivoire », déclare-t-il à ce propos.

Mais cette idée n’est pas partagée par la classe politique, notamment l’opposition, qui ne manque pas de réagir.

Pour la plateforme de l’opposition «Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS)», proche de l’aile dure du Front populaire ivoirien, cette déclaration n’est que de la pure provocation contre le peuple ivoirien.

«L’idée d’un 3ème mandat -le chef de l’Etat actuel le sait- est anticonstitutionnelle, inacceptable et irréalisable en Côte d’Ivoire», souligne le Pr Georges-Armand Ouégnin, président de l’Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS), dans un communiqué.
Le principal opposant Pascal Affi Nguessan précise, pour sa part, dans une déclaration à la presse que l’actuel chef de l’Etat «a fini ses deux mandats et n’a plus rien à faire dans la politique ivoirienne».

Pour lui, «La loi est claire, aucun Ivoirien ne peut briguer plus de deux mandats présidentiels».

Au sein des dirigeants politiques proches du président Alassane Ouattara, des voix se font aussi entendre.

Daniel Kablan Duncan, actuel vice-président de la Côte d’Ivoire et cadre du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a réagi à cet effet : «Il n'a pas dit qu'il allait être candidat. Écoutez bien la formulation de sa phrase, c’est une possibilité, il n’a pas dit qu’il va l’être. Il se prononcera le temps venu» a-t-il déclaré, au cours d’un meeting à Bongouanou (Est ivoirien).

Plus catégorique, Maurice Kakou Guikahué, secrétaire exécutif en chef du PDCI et bras droit de l’ex-président Henri Konan Bédié a estimé, dans un communiqué, que «Ouattara ne sera pas candidat pour un troisième mandat», a-t-il affirmé. «C’est écrit dans la Constitution qu’au plus tard, le 5 décembre 2020, le président sortant devra se soumettre à une passation des charges avec le nouveau président», a-t-il argumenté.

Cissé Bacongo, principal conseiller juridique du président Alassane Ouattara, membre du comité d’experts chargé de rédiger la constitution de 2016 va dans le même sens.

Dans une interview accordée à Dnews Tv en date du 24 octobre 2016, Cissé Bacongo, avait réfuté l’éventualité d’une candidature du président Ouattara au scrutin présidentiel de 2020.

Il avait montré que les textes de l’ancienne et de la nouvelle Constitution stipulent que «Le président est élu pour 5 ans renouvelables une seule fois », s’interrogeant en conséquence : « Mais d’où vient l’idée que le président va pouvoir se présenter».

Le camp de Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale et possible candidat en 2020, s’est aussi joint au débat sans, toutefois, caresser, dans le sens du poil, l’actuel président.

L’ancienne ministre de la Communication, Affousiata Bamba Lamine, proche de Soro, se veut catégorique : «l’actuel président de la République n’est pas éligible en 2020, ne peut prétendre à un troisième mandat et ne peut, donc, pas être candidat», martèle-t-elle dans un tweet.

Les juristes portent aussi un regard sur la question.

L’ancien président du Conseil constitutionnel, Francis Wodié, intervenant au cours d’une cérémonie, conseille la prudence.
«Nous en sommes encore au stade des supputations, des hypothèses», avance-t-il.
«Mais le président de la République est un homme majeur, un homme responsable qui sait ou doit savoir ce qu’il doit faire, non pas seulement pour lui-même, mais d’abord pour le pays. Donc c’est à lui de voir, de juger pour n’avoir à faire que ce qui va dans le sens de l’intérêt de la Côte d’Ivoire, donc, de l’intérêt général», explique-t-il.

Le juriste, Dr Geoffroy-Julien Kouao, joint par Anadolu estime que cette déclaration du Ouattara vise à réveiller la classe politique.

«Le président Ouattara a le mérite de réveiller l’opposition politique qui était frappée de mutisme et drapée dans ses contradictions internes. Mais, aussi de faire bouger un peu la coalition au pouvoir pour remettre à jour les velléités de contrôle de cette coalition dans l’objectif de la présidentielle de 2020».

La question est, donc, loin d’être tranchée.

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