Afrique

« Mère courage » et la Maison du Bonheur

-C'est le récit de Mme Gharbi, une mère courageuse qui a réussi à transformer sa tragédie personnelle, à savoir la perte de sa fille "Maram" emportée par un cancer à l'âge des bourgeons,

Mona Saanouni  | 11.03.2021 - Mıse À Jour : 12.03.2021
« Mère courage » et la Maison du Bonheur

Tunisia

AA / Tunis / Mona Saanouni

A l'occasion de l'inauguration, le 15 février dernier, de « Dar Maram », maison d'hébergement dédiée aux parents d'enfants atteints de cancers, l'Agence Anadolu est partie à la rencontre de Mme Manel Gharbi, co-fondatrice et vice-présidente de l’Association « Maram Solidarité », et initiatrice de ce projet.

Mme Gharbi incarne le courage d’une mère ayant perdu un enfant à cause d’un cancer pédiatrique. Elle a fait de cette bataille, contre le cancer chez les enfants, la sienne, et s’est jurée de pérenniser le nom de sa fille « Maram » pour la bonne cause.

« Fondée le 30 janvier 2014, l’Association avait pour objectif premier de récolter une somme d’argent permettant à Maram de se faire soigner à l’étranger après avoir été diagnostiquée avec un neuroblastome, forme rare d’un cancer pédiatrique, surtout qu’on n’a pas bénéficié d’une prise en charge par les structures médicales étatiques", a confié Mme Gharbi à l'Agence Anadolu.

« Le traitement à l’étranger consistait en une autogreffe pédiatrique à l’Institut Gustave Roussy, en France. Le fonds s’élevait à 700 mille dinars (environ 255 mille dollars) pour lui assurer les soins nécessaires à sa survie. Malheureusement, Maram est décédée le 08 octobre 2014 à Paris sans pouvoir faire son autogreffe », a-t-elle expliqué.

« Cependant, son papa et moi avons décidé de poursuivre le combat, et nous-voilà, 7 ans après. Depuis, nous avons quand même parcouru un long chemin », a-t-elle ajouté.

Et Mme Gharbi d'expliquer qu' « à l’époque, on avait déjà commencé à envoyer des enfants pour être soignés en France, sauf que les soins étaient toujours excessivement chers ».

« Confrontés au budget, nous avons estimé que ce mode d’action ne pourrait pas se poursuivre. C’est alors que nous avons tracé une stratégie pour l’association, et nous nous sommes focalisés sur l’infrastructure en Tunisie pour rénover les services d’oncologie pédiatrique à Tunis », a-t-elle martelé.

« En effet, nous avons réussi à rénover l’unité d’oncologie pédiatrique de l’Institut Salah Azaiez, celle de l’hôpital d’enfants, également. Par la suite, nous avons mis en place des écoles au sein de quelques hôpitaux, telles que le centre de greffe de la moelle osseuse, et nous avons envoyé 4 médecins pour se former à l’étranger », a-t-elle expliqué.

Notre interlocutrice a, par ailleurs, souligné que « l'Association a décidé de faire la première autogreffe pédiatrique en Tunisie ».

« Pour ce faire, nous avons mobilisé tous les Tunisiens avec l’aide du comédien Jaafar Guesmi pour bâtir un espace de 1 000 mètres carrés au centre de greffe de la moelle osseuse. Une fois le projet réussi, nous avons pu acquérir la machine de collecte des cellules souches et, en coopération avec le ministère de la Santé et une grande équipe de médecins, nous avons réussi à faire la première autogreffe en Tunisie. On en est à 15 aujourd’hui », a-t-elle souligné, fièrement.

** Dar Maram ou « La Maison du Bonheur »

« C’était mon premier rêve… J’avais vécu dans une maison d’accueil avec Maram à Paris. Cette maison accueille les parents qui viennent des régions et d’autres pays pour accompagner leurs enfants souffrant du cancer. L’idée était de calquer ce même modèle et de le faire ici en Tunisie, notamment parce que moi-même j’avais vécu dans un hôpital public et j’étais témoin de la souffrance des enfants et de leurs mères qui passent entre 3 et 4 mois dans ces espaces », s'est-elle rappelée.

« Cette maison est un don de la part de deux grands-parents dont la petite-fille avait souffert du cancer également. Nous avons fait des travaux pour retaper l'ensemble du bâtiment », a expliqué Mme Gharbi.

Elle a noté que « Dar Maram est un lieu pour héberger les mamans et les enfants souffrants et leur garantir un cadre serein pour passer un agréable moment, malgré la douleur ».

« C'est une maison où elles peuvent vivre comme chez elles, et j’espère que ce lieu convivial puisse leur offrir un instant de bonheur », a-t-elle espéré.

"La Maison comporte 36 lits qui seront répartis sur 4 hôpitaux. Pour le moment, nous coopérons avec un seul hôpital vu la conjoncture actuelle, et étant donné qu’on est soucieux de la sécurité des enfants et de tous ceux qui résident ici", a-t-elle poursuivi.

«Dar Maram est un espace de vie. On y reçoit des enfants qui ne veulent plus quitter la maison, même pas pour rentrer chez eux ! J’espère qu’ils rentreront chez eux en bonne santé», a-t-elle souhaité.

«La Maison offre une panoplie d’activités pour les enfants qui résident ici, tels que le dessin, la musique, la lecture. On a également un petit terrain de foot et un autre terrain de tennis. Nous veillons au bon déroulement du séjour aussi bien pour l’enfant que pour la maman ».

*Procédure d’admission à Dar Maram et critères de sélection

« Tout d’abord, les dossiers sont envoyés par les médecins traitants des enfants. C'est-à-dire qu’on ne reçoit pas des mamans sans un dossier médical qui nous est adressé par le médecin traitant de l’enfant avec le type du cancer, la durée du traitement et la durée du séjour souhaité à la maison. Il faut une preuve que l’enfant est traité dans la capitale, et qu’il appartient à une famille démunie ne pouvant pas assurer un hébergement à Tunis durant toute la période du traitement », a-t-elle indiqué, en soulignant qu'il faudrait que la maman accepte également de vivre dans cette maison, selon un règlement intérieur, afin d’assurer le bon déroulement de son séjour.

S'agissant des projets futurs, Mme Gharbi a répondu : « Nous envisageons de rénover un service de radiologie et un service de chirurgie pédiatrique dans deux hôpitaux différents à Tunis. On est également en train d’étudier la possibilité de fonder l’Association en France et en Algérie, en attendant notre ultime projet qui consiste en la mise en place d’un centre d’oncologie pédiatrique en Tunisie, un jour j’espère… ».

Quant au financement de l’Association Maram Solidarité, Mme Gharbi a souligné que c'était grâce aux dons des Tunisiens et au partenariat de grandes enseignes tunisiennes qui contribuaient à l’approvisionnement de la Maison en produits alimentaires et autres.

**Nidhal, premier enfant souffrant hébergé à Dar Maram

Nous avons rencontré la maman de Nidhal qui a confié à l’Agence Anadolu, qu’elle avait été bien accueillie et qu’elle se sentait comme chez elle.

Elle a affirmé que l’état de santé de son petit Nidhal s’est amélioré depuis son entrée à la Maison. Mme N. a déclaré, les larmes aux yeux, que cette opportunité offerte par « Dar Maram » lui a permis d'éviter l'inconfort de l’hôpital public. Elle a noté qu’elle avait noué des amitiés avec le personnel de la Maison et qu’elle était bien entourée et bien encadrée.

Chapeau-bas, Madame Gharbi !

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