L’Algérie veut rentabiliser son soleil
- Un projet de 4050 MW en centrales solaires photovoltaïques, soit prés du ¼ de la puissance totale actuelle installée qui est de 17088 MW, est au coeur de la nouvelle stratégie du pays.

Algeria
AA/ Alger/ Khedidja Baba Ahmed
Cap sur l’énergie solaire : c’est la première fois que l’Algérie semble résolue à aller vers cette énergie nouvelle, même si, il y a plus de 20 années, dans le début des années 90 et à titre d’expérimentation, 20 villages du sud algérien ont été alimentés sous cette forme.
On n’est plus à petite échelle. Il s’agit aujourd’hui d’un projet de 4050 MW en centrales solaires photovoltaïques, soit prés du ¼ de la puissance totale actuelle installée qui est de 17088 MW.
Plusieurs facteurs concourent à cette stratégie algérienne, tournée vers l’utilisation d’énergies renouvelables, autrefois quelque peu délaissées.
C’est en force que les responsables de la compagnie de l’engineering de l’électricité et du gaz CEEG (filiale de SONELGAZ) et à leur tête leur PDG, Mohamed Arkab se sont rendus à Washington pour exposer le projet algérien au forum « Africa Summit Energy », consacré au développement de l’investissement dans le secteur énergétique en Afrique.
L’occasion était à exploiter dans la mesure où à ce 3ème forum étaient présents prés de 400 investisseurs en recherche de projets en Afrique. Étaient également là, des représentants de la Banque mondiale et ceux de plusieurs banques et agences gouvernementales américaines. Une opportunité sans pareil pour faire appel à ces investisseurs, en leur fournissant d’abord toutes les informations techniques de ce projet et en les informant ensuite que ce projet va faire l’objet d’un appel d’offres en cette fin de mois de mars, ou au plus tard début avril. C’est en tout cas ce qu’a annoncé le responsable algérien. Mais que recouvre au juste ce projet ?
• Centrales solaires et base industrielle photovoltaïque
Les 4050 MW projetés s’inscrivent dans le cadre de la mise en œuvre du programme national de développement des énergies renouvelables, adopté en 2011 par le gouvernement et révisé en mai 2015. Ce programme a pour objectif d’installer 22.000 MW d’ici 2035-2040, ce qui portera à cet horizon les énergies renouvelables à plus de 27% de la production nationale de l’électricité. Quant au projet de 4050 MW de centrales solaires photovoltaïques que les responsables s’apprêtent à lancer, il sera scindé en trois lots de 1350 MW chacun.
Avec les centrales figure aussi une partie industrielle consistant en la création de plusieurs coentreprises spécialisées dans la fabrication de modules, d’onduleurs et d’autres équipements photovoltaïques. Les coentreprises qui seront créées devront aussi assurer des prestations de service liées à la chaîne de production d’électricité solaire et la commercialisation des produits fabriqués.
L’objectif recherché est naturellement la création d’une base industrielle du photovoltaïque dans le pays. Ces centrales solaires seront implantées dans le sud du pays et plus précisément dans les provinces de Bechar ; El Oued ; Ouargla ; Biskra ; Djelfa et de M’Sila.
Quant aux coûts de ces projets, rien n’est pour l’heure, officiellement affiché.
• L’énergie renouvelable comme alternative incontournable ?
L’existence de réserves importantes de pétrole et de gaz dans le sous-sol algérien a conduit de fait des décennies durant les pouvoirs successifs à privilégier ses ressources fossiles comme moyen de production de l’électricité. C’est ainsi que la capacité de production installée durant toutes ces années a été résolument axée sur le thermique vapeur, les turbines à gaz et le cycle combiné. L’Algérie étant un pays semi-aride, n’ayant pas de grandes ressources hydriques, l’eau a été essentiellement réservée à l’agriculture et aux ménages. Très peu d’investissements hydrauliques ont vu le jour en dehors de la réhabilitation de très vieille centrales essentiellement au fil de l’eau et dont la capacité totale n’excède pas 400 MW. Des groupes Diesel ont également participé à renforcer la capacité de production, notamment dans les régions isolées et non interconnectées au réseau.
Quant au solaire, seule une vingtaine de villages dans le sud, ont bénéficié de l’installation de très petites centrales, aux capacités limitées aux seuls besoins très basiques tels que l’éclairage ou la télé, par exemple.
En dehors de l’utilisation du pétrole et du gaz pour la production électrique, et en l’absence d’autres produits à l’exportation, ce sont le pétrole et le gaz qui ont assuré pour 96% les recettes d’exportation du pays.
Cette situation a trouvé ses limites d’abord dans le fait que les réserves ne sont pas éternelles et qu’il fallait bien penser à en préserver un minimum, même si les responsables du secteur ne cessent de tenter de rassurer en déclarant « qu’on en a encore pour cent ans pour le gaz et 20 ans pour le pétrole. Par ailleurs, la crise pétrolière et la baisse des prix qui s’en est suivie allaient changer la donne et contraindre l’Algérie, comme d’autres pays d’ailleurs, à penser à une autre stratégie énergétique, celle qui permet de préserver les ressources existantes et de veiller à l’environnement par des énergies non polluantes.
Un atout de taille s’offrait à l’Algérie : plus de 3000 heures d’ensoleillement par an. Avec ce potentiel national dominé par le solaire, le pays considère cette énergie comme une opportunité et un levier de développement économique et social à travers, notamment, l’implantation d’industries créatrices de richesses et d’emploi. De plus, si l’Algérie a été jusque là très frileuse pour choisir le solaire, la raison en était aussi son coût trop élevé. Or, aujourd’hui selon les experts, le coût de production mondial du photovoltaïque a diminué de plus de 50%.
Enfin, le programme de développement des énergies renouvelables fixé par l’Algérie, en réduisant l’utilisation du gaz dans la production de l’électricité permettra d’économiser 240 milliards de mètre cubes de gaz naturel, soit 63 milliards de dollars sur 20 ans, ce qui est loin d’être négligeable, en ces temps d’austérité.