Madagascar : La réconciliation nationale pour rompre un cycle des crises récurrentes
Madagascar a connu quatre crises politiques depuis son indépendance en 1960. Des périodes d’instabilité qui ont largement mis à mal l’économie du pays.

Madagascar
AA/Antananarivo/Sandra Rabearisoa
Madagascar a connu quatre crises politiques depuis son indépendance en 1960. Les années 1972, 1991, 2002 et 2009 marquent des périodes d’instabilité qui ont largement mis à mal l’économie du pays.
Pour sortir de ce cycle infernal, l’Etat a décidé d’entamer un processus de réconciliation à travers la mise en place du Conseil du Fampihavanana Malagasy (CFM) ou Conseil pour la Réconciliation Nationale. Eradiquer et prévenir les crises récurrentes, tel est le principal objectif dans la mise en place de cette institution.
Il s’agit d’une nouvelle version du «Filan-kevitry ny Fampihavavana Malagasy» ou FFM (Structure provisoire mise en place pendant le régime de transition).
Notons que les leaders religieux ont déjà lancé une réconciliation en rassemblant l’actuel président Hery Rajaonarimampianina ainsi que les quatre anciens présidents, à savoir, Didier Ratsiraka, Albert Zafy, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina en 2014. Une rencontre qui n’a finalement pas pu aboutir à une quelconque entente, car les participants ont, tour à tour, quitté la table des négociations.
Cette fois-ci, le CFM prendra donc la relève. Ses 33 membres, choisis par voie de sélection, viennent de prêter serment le 13 septembre dernier à la Cour Suprême d’Antananarivo. Une cérémonie à laquelle ont notamment assisté le président de la République malgache Hery Rajaonarimampianina et le Premier ministre et chef du gouvernement, Mahafaly Solonandrasana Olivier.
Qualité morale, intégrité, sens de la Justice, du devoir, du bien public et de l’intérêt général, ainsi qu’une connaissance profonde de Madagascar, font partie des critères de sélection.
Dans leur serment, les membres du CFM se sont engagés à la recherche de la vérité, le respect de la dignité humaine et les droits de l'homme. Ils doivent également veiller à la préservation de l'unité nationale et la solidarité nationale. Pour le doyen des membres de cette institution, la présence du président de la République à cette cérémonie de prestation de serment exprime «l'importance accordée par le chef de l'État au Fihavanana Malagasy pour asseoir une paix durable et un développement économique réel et avantageux à Madagascar».
Pour une guérison des blessures
«Cet organe exerce, la plénitude de compétence dans l’accomplissement de sa mission afin de soigner et guérir les blessures individuelles et collectives du passé, en vue d’établir les saines fondations pour l’avenir de Madagascar», souligne un communiqué de la présidence de la République de Madagascar.
Un passé marqué par des crises politiques dont la plus récente fut celle de 2009 qui a vu la chute du régime de l’ancien président, Marc Ravalomanana et qui fut contraint de s’exiler en Afrique du Sud. Et dans l’avenir, l’élection présidentielle de 2018 constitue un rendez-vous important dont la préparation doit se tenir dans un climat apaisé selon la Société Civile.
Le préambule de la Constitution de la IVème République malgache stipule, d’ailleurs, qu’il «est indispensable de mettre en œuvre un processus de réconciliation nationale».
Le même principe est défini dans les dispositions des articles 25, 26 et 27 de la Feuille de Route du 17 septembre 2011 pour la sortie de crise à Madagascar, insérée dans l’ordonnancement juridique par la Loi n°2011-‐014 du 28 décembre 2011. Et pour se conformer à l’article 168 de la Constitution, le Président de la République, a promulgué le décret n° 2015-‐1105 du 8 juillet 2015, pris en Conseil des ministres, portant révision des textes sur le Conseil du Fampihavanana Malagasy (CFM).
La classe politique divisée
La mise en place de cette institution de réconciliation, un an avant la prochaine tenue de l’élection présidentielle en 2018, divise pourtant les acteurs politiques malgaches.
Dans une déclaration à Anadolu, Maka Alphonse, ancien journaliste et actuel membre du CFM plaide pour la nécessité d’une réconciliation nationale avant les élections de 2018. «Notre mission, définie par la loi, est d’assurer un climat politique apaisé avant les élections. Nous devons, donc, nous en assurer », déclare-t-il avec optimisme.
Et d’ajouter qu' «il n’existe pourtant pas de recette miracle pour réussir la réconciliation. Cela exige beaucoup de courage mais également de la volonté de la part de tous les acteurs incluent les politiciens et les membres de la société civile».
Pour sa part, Christine Razanamahasoa, parlementaire issue de la plate-forme Mapar (opposition) estime que la mise en place du CFM n’est pas une priorité. «L’Etat devrait se pencher sur d’autres priorités comme la résolution des problèmes d’insécurité ou de la pauvreté. Je me demande si la réconciliation nationale permettrait de sortir de nos tourments actuels». Sur cette lancée, elle martèle que la tenue d’élections anticipées permettra d’arriver à un climat de stabilité.
Le CFM attend la validation de son règlement intérieur par la Haute Cour constitutionnelle avant de procéder à l’élection de son président. L’institution pourra donc être opérationnelle d'ici la fin du mois d'octobre, selon un de ses membres.