Politique

Tunisie : De grands changements marquent la fin de 2018

Des élections générales se tiendront en 2019

Mona Saanouni  | 24.12.2018 - Mıse À Jour : 25.12.2018
Tunisie : De grands changements marquent la fin de 2018

Tunisia

AA/Tunis/Adel Thabti  

En Tunisie, l’année 2018 est bientôt finie. Cette année a été marquée par de multiples changements dans la scène politique.

La scène était principalement caractérisée par la coalition gouvernementale entre les partis de Nida Tounes et d’Ennahdha, née à la suite des élections d’octobre 2014.

L’annonce du président tunisien, Beji Caïd Essebsi, relative à la fin de son consensus avec le « Mouvement Ennahdha » , était parmi les changements politiques survenus au cours de cette année.

Il convient, également, de noter l’éloignement du Premier ministre, Youssef Chahed, du président Essebsi et de la Direction actuelle de son parti « Nida Tounes » (Libéral)

D’une autre part, la crise économique se poursuit et ses impacts sociaux sont visibles. Dernièrement, des milliers de citoyens sont sortis protester dans la rue.

-Protestation et déploiement de l’armée

L’adoption de la loi des finances de l’année 2018, en décembre 2017, était suivie par une hausse des prix du carburant, des cartes de recharge téléphonique, des services d’internet, des parfums et des produits cosmétiques.

Le 8 janvier 2018, des protestations avaient éclaté dans le gouvernorat de Kasserine (centre-ouest), contre l’augmentation du coût de la vie.

Ces protestations se sont étendues vers d’autres régions, dont Tebourba dans le gouvernorat de La Manouba (nord-est), là où un citoyen protestataire avait péri. Le ministère de l’Intérieur avait démenti qu’une voiture de police l’ait écrasé, selon les médias.

D’autres protestations avaient également eu lieu, le 9 janvier, dans les gouvernorats de Kairouan (centre), de Mehdia (est), de Gafsa (sud-ouest) et de Nabeul (nord-est), ainsi que de Sousse (est) et d’un nombre de quartiers populaires dans la capitale, dont Ettadhamen et Al-Intilaka. Des actes de vandalisme ont, cependant, eu lieu au cours de ces protestations.

Le porte-parole du ministère tunisien de la Défense avait déclaré à Anadolu que l’armée tunisienne avait déployé plus de 2 mille soldats dans 123 points du pays, afin de protéger les institutions de souveraineté.

Pour sa part, le Premier ministre, Youssef Chahed avait accusé « les réseaux de corruption » et « le Front populaire » (Gauche/ 15 députés sur 217) d’avoir incité aux actes de violence et de vandalisme, en mobilisant des groupes de jeunes.

Il avait annoncé, lors d’une visite à la région d’El-Batan à La Manouba (nord de la capitale), l’ouverture d’une enquête pour « dévoiler les parties impliquées dans ces actes ».

Dans ce contexte, Chahed avait qualifié la position du « Front populaire » d’« irresponsable », étant donné que ses députés votent pour la loi des finances et protestent, ensuite, contre cette loi.

Le ministère de l’Intérieur avait annoncé, le 10 janvier, l’arrestation de 206 éléments impliqués dans des opérations de vol, au cours des protestations.

Quarante-neuf agents de police avaient été blessés, dans différentes régions, lors des confrontations avec les protestataires. Des dégâts avaient également touché 45 voitures de police au cours des mêmes événements, selon le ministère.

Le début de l’année avait, d’autre part, été marqué par la visite du président français Emmanuel Macron en Tunisie, entre le 31 janvier et le 1er février 2018,.

Macron avait apporté un appui financier de 500 millions d’euros. La visite était également l’occasion pour signer 8 mémorandums et partenariats qui renforcent la coopération bilatérale entre les deux pays.
En dépit de cet appui, certains experts avaient considéré, dans des déclarations à Anadolu, que le soutien de Paris à la Tunisie était limité.

-Carthage 2 et la tentative de destituer le gouvernement de Youssef Chahed

Vers la mi-mars 2018, Essebsi avait appelé à une réunion des parties signataires de l’accord de « Carthage 1 ». Cette réunion avait abouti à la décision de former une commission pour l’élaboration d’une feuille de route, visant à appliquer les réformes économiques et sociales de priorité.

L’accord de Carthage est un document comprenant les priorités du gouvernement, signé en juillet 2016, entre autres, par l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT-plus grand syndicat d’ouvriers) et par l’Union Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat (UTICA-organisation patronale).

L’accord avait également été signé par l’Union des Agricoles (indépendant) et des partis politiques, dont Ennahdha (68 députés) et Nida Tounes (46 députés).

Le but de la réunion était de changer le gouvernement de Chahed, selon les déclarations de certaines parties participantes.

Le Secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, avait, pour sa part, considéré que le gouvernement de Chahed était « un gouvernement de gestion des affaires courantes ».

Il avait déclaré aux médias que le gouvernement qui serait issu de la commission de « Carthage 2 » conduirait le pays jusqu’à la fin du mandat parlementaire actuel (vers la fin de l’automne 2019).

Le Directeur exécutif de Nida Tounes, Hafedh Caïd Essebsi, avait souligné, à la suite de la réunion, que « le remaniement ministériel est lié à la feuille de route ».

« Nous ne voulons pas que ce soit un remaniement formel, mais, en profondeur et basé sur les priorités économiques et sociales », avait-il ajouté.

Vers la fin mai 2018, le président Essebsi avait décidé de suspendre l’application de l’accord de Carthage pour un délai indéterminé, au milieu des différends qui se maintenaient entre les signataires du Document, à propos d’un remaniement partiel ou entier du gouvernement.

Une source bien informée auprès des concertations de Carthage avait déclaré à Anadolu que le président avait suspendu le dialogue car le Mouvement Ennadhdha refusait de limoger Youssef Chahed.

***Elections municipales… Les Indépendants en premier

Les premières élections municipales depuis la révolution de 2011 ont eu lieu, le 6 mai dernier.

Les listes indépendantes ont remporté ces élections avec 32.9% de voix, suivies par les listes du Mouvement Ennahdha avec 29.68% et les listes de Nida Tounes avec 22.17%.

Les Indépendants ont donc obtenu 2367 sièges aux Conseils municipaux dans toutes les circonscriptions, tandis qu’Ennahdha a obtenu 2135 sièges contre 1595 pour Nida Tounes.

L’Alliance du Front populaire est venue en 4ème position avec 295 sièges (3.6%), suivie par le Courant Démocratique (3 députés), ayant obtenu 205 sièges (2.85%).

Quant à « MachrouuTounes » (Parti dissident de Nida Tounes), il a gagné 124 sièges (1.7%), suivi par « Le Mouvement du Peuple » (nationaliste) avec 100 sièges (1.39%) et « AfakTounes » (libéral) avec 93 sièges (1.29%).

La victoire du parti Ennahdha lors des municipales revient, selon certains analystes, à trois facteurs : sa force organisationnelle, l’éparpillement du mécanisme électoral de son adversaire et l’abstention d’une part importante d’électeurs.

Au début de juillet dernier, Souad Abderrahim, qui était à la tête de la liste d’Ennahdha, a été élue comme présidente du Conseil de la municipalité de la capitale Tunis, avec 26 voix contre 22 voix pour son concurrent Kamel Idir, représentant de la liste de Nida Tounes. Elle est la première femme élue pour ce poste.

****Avenir de Chahed

Vers la fin du mois d’août, plusieurs députés de différents blocs parlementaires ont annoncé la formation du bloc « Coalition nationale », composé de 44 députés. Ce bloc a été considéré, par certains observateurs, comme étant proche du Premier ministre.

Un membre du bloc a déclaré à Anadolu, en novembre dernier, qu’ils optent pour la création d’un nouveau parti vers la fin de l’année 2018.

Il a ajouté que « le moment est venu pour la génération de Youssef Chahed (43 ans) et les personnes âgées entre 40 et 50 ans, pour qu’ils prennent la relève ».

Ce bloc supporterait Youssef Chahed, qui s’est éloigné de son parti Nida Tounes, aux prochaines élections, selon certaines analyses politiques.

Le 13 novembre dernier, le Parlement a adopté une décision pour un remaniement ministériel élargi, proposé par Chahed, malgré l’opposition du Président Essebsi (92 ans).

Ce remaniement a bénéficié de l’appui du Mouvement Ennahdha et du Parti MachrouuTounes (libéral/ 14 députés), ainsi que du parti de « l’Initiative nationale destourienne » (central-destourien/3 députés).

Il a également été approuvé par le bloc de la Coalition nationale et par le Parti « Voie démocratique et sociale » (n’a pas de députés au parlement).

***Fin du consensus

Le 25 septembre dernier, le Président Essebsi, a annoncé que la relation de consensus qui l’unissait au « Mouvement Ennahdha » était finie, après la nouvelle relation que les dirigeants d’Ennahdha ont choisi d’établir avec Chahed.

Le consensus entre les deux partis au pouvoir avait né il y a 5 ans et avait sauvé le pays de la violence.

La déclaration d’Essebsi est liée à l’opposition d’Ennahdha au limogeage de Chahed. Le Mouvement optait pour la stabilité politique.

Il a mis en garde contre la déclaration du président, qui pourrait approfondir la crise politique et appelé à déployer des efforts pour reprendre la relation et aboutir à des consensus à travers le dialogue.

-Les développements attendus en 2019

En décembre courant, des protestations sociales se sont déclenchées, dont celle de milliers de professeurs de l’enseignement secondaire et des collèges.

Ces enseignants revendiquent, entre autres, des augmentations salariales, pendant que les institutions financières internationales recommandent d’éviter l’augmentation des salaires pour sauver l’économie du pays.

Plusieurs développements sont attendus en 2019, notamment la tenue d’élections générales en automne, pour élire de nouveaux parlementaires et un nouveau président du pays.

Quels que soient ces développements, ils revêtent d’une grande importance, vu que la Tunisie est considérée comme étant la seule expérience démocratique réussie dans les pays du « Printemps arabe ».






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