
France
AA / Tunis / Fatma Ben Amor
La France insoumise a dévoilé, ce samedi 31 août, sa proposition de destitution du président Emmanuel Macron, à destination des députés.
Dans le texte long de quatre pages que LFI indique avoir "envoyé aux députés pour cosignatures", les insoumis dénoncent "un manquement grave au devoir de respect de la volonté exprimée par le suffrage universel, seul souverain en France".
Pour engager cette procédure de destitution, LFI se réfère à l'article 68 de la Constitution. Le mécanisme a été instauré sous le mandat de Jacques Chirac, dans la réforme constitutionnelle de 2007 et est applicable depuis une loi organique de 2014. L’article 68 organise la destitution du président "en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat", alors qu'avant la réforme, le motif requis était une "haute trahison".
Mais avant d’en arriver à la destitution, il faut suivre une procédure longue et délicate.
Pour recourir à une telle démarche, les parlementaires doivent, en premier lieu, justifier dans leur proposition de résolution "des motifs susceptibles de caractériser un manquement au sens du premier alinéa de l’article 68 de la Constitution". Dans le cas d'espèce, la question est de savoir si le fait de ne pas nommer un Premier ministre dans un certain délai, ni d’un certain camp, peut être considéré comme un manquement grave du président aux obligations de sa fonction.
Les députés doivent ensuite réunir les signatures d’au moins un dixième des membres de leur assemblée, soit 58 députés ou 35 sénateurs, pour enclencher la procédure. Le groupe LFI dispose, faut-il le préciser, de 72 députés au Palais-Bourbon.
Ensuite, c'est au bureau de l’assemblée concernée de vérifier la recevabilité de la proposition de résolution. Passé ce cap, c’est à la commission des lois de valider -ou pas- la proposition. En cas de validation, l’assemblée concernée doit l’adopter à la majorité des deux tiers dans un délai de quinze jours. Ni LFI ni même l’ensemble des partis du Nouveau Front populaire (NFP) n’atteignent à eux seuls ce seuil à l'Assemblée nationale. Même s'ils y arrivent, la question sera ensuite renvoyée au Sénat, qui doit aussi la valider, dans les quinze jours, à la majorité des deux tiers. Si ces conditions sont remplies, le président est renvoyé devant la Haute Cour, composée de l’ensemble des députés et des sénateurs. Les membres de la Haute Cour doivent se prononcer, à nouveau, à la majorité des deux tiers, soit 617 parlementaires sur 925, ce qui nécessite un large consensus transpartisan.
Ainsi, pour des conditions d’une majorité difficilement atteignable, la proposition de destitution du président Macron, formulée par LFI, a très peu de chances d'aboutir.
En 2016, des députés républicains avaient tenté de lancer une procédure de destitution contre François Hollande, lui reprochant d'avoir trahi le secret défense dans des confidences à des journalistes. La démarche avait très vite tourné court, les députés n'ayant même pas réussi à passer le cap de la recevabilité de la proposition.
Aucun président français n'a été destitué à ce jour.