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Tournée du prince héritier saoudien: objectifs et significations (Analyse)

- Il semble qu’un lien existe entre la tournée du prince héritier saoudien en Égypte, en Jordanie et en Türkiye, et la prochaine visite attendue du président américain, Joe Biden, qui le mènera en Arabie saoudite, en Israël et en Palestine

Majdi Ismail  | 25.06.2022 - Mıse À Jour : 25.06.2022
Tournée du prince héritier saoudien: objectifs et significations (Analyse)

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AA / Istanbul / Ihsen Fekih

* Des observateurs estiment que la visite du prince héritier saoudien en Türkiye fondera une nouvelle phase dans les relations entre les deux pays, compte tenu, notamment, de l’évolution de la guerre russe en Ukraine et des changements apportés sur les stratégies américaines dans la région du Moyen-Orient, parallèlement à la réélaboration des alliances régionales et internationales.


Plusieurs pays s’emploient à traiter les nouveaux changements apportés à la politique américaine, des suites de l’enclenchement de la guerre russe en Ukraine, en vue de réélaborer ses relations et ses alliances régionales et internationales.

Au premier rang de ces pays figure l’Arabie saoudite, qui s’apprête à accueillir le président américain, Joe Biden, le 16 juillet prochain, dans ce qui constituera sa première visite dans la région du Moyen-Orient, depuis son arrivée à la Maison Blanche, à l’orée de l’année 2021.

La ville saoudienne de Djeddah devrait abriter un sommet arabo-américain, à l’appel du monarque saoudien, Salman bin Abdulaziz, en présence de Joe Biden, des dirigeants des six pays du Golfe, du roi Abdallah II de Jordanie, du président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi et du Premier ministre irakien, Moustafa al-Kazimi.

Nombre d’observateurs estiment qu’un lien existe entre la tournée du prince héritier saoudien, Mohammed bin Salman en Égypte, en Jordanie et en Türkiye, du 20 au 22 juin, et le prochain déplacement prévu de Joe Biden.

Biden, dont la tournée comportera en plus de l’Arabie saoudite, Israël et la Palestine, discutera des éventuelles menaces sécuritaires iraniennes et d’autres questions relatives à l’énergie et à l’investissement.

Selon des médias arabes, le prince héritier saoudien a examiné avec les dirigeants des trois pays, en l’occurrence, l’Égypte, la Jordanie et la Türkiye, une série de questions régionales et internationales d’intérêt commun.

Il s’agit, essentiellement, du dossier nucléaire iranien, de la guerre au Yémen, des conséquences de la guerre russe en Ukraine sur les économies de la région et du renforcement des relations bilatérales dans plusieurs secteurs, économiques, commerciaux et des investissements.

Lors de sa première étape au Caire, le prince héritier saoudien a débattu avec le chef d’Etat égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, des voies et moyens à même de faire face aux dangers qui guettent la région, affirmant leur « volonté commune d’aller de l’avant sur la voie de l’approfondissement et du développement des relations entre les deux pays », indique un communiqué égyptien.

Le sommet du Caire est le deuxième qui réunit les deux parties en l’espace de trois mois après celui tenu le 8 mars dernier dans la capitale saoudienne Riyad.

À l’issue de la visite, l’Égypte a réaffirmé sa « position constante à l’égard de la sécurité de la région du Golfe, considérée comme un prolongement de la sécurité nationale égyptienne, et son rejet de toute pratique qui vise à déstabiliser la région », sans pour autant nommer un pays, une organisation ou une partie quelconque.

Les deux parties, égyptienne et saoudienne, sont convenues de souligner « l’importance du sommet prévu qu’accueillera l’Arabie saoudite, en présence des dirigeants des pays du Conseil de coopération du Golfe, de l’Égypte, de la Jordanie, de l’Irak et des États-Unis ».

Dans le volet économique, l’Arabie saoudite et l’Égypte ont conclu une série d’accords économiques et commerciaux, d’une valeur de 7,73 milliards de dollars.

Lors de la deuxième étape de sa tournée, le prince héritier saoudien s’était rendu, mardi, dans la capitale jordanienne. Des médias locaux ont rapporté que Riyad et Amman se sont accordés à appuyer les efforts visant à interdire l’Iran de s’approprier l’arme nucléaire.

Le Cabinet royal jordanien a, dans un communiqué rendu public, indiqué que « les royaumes jordanien et saoudien sont convenus de soutenir les efforts internationaux visant à empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire et de garantir le caractère pacifique du programme nucléaire de Téhéran ».

Les deux pays sont convenus de la nécessité de « soutenir les efforts internationaux visant à interdire l’appropriation par l’Iran de l’arme nucléaire, et de garantir le caractère pacifique de son programme, tout en renforçant les efforts arabes visant à exhorter l’Iran à s’engager à ne pas s’ingérer dans les affaires des pays arabes ».

S’agissant de la Cause palestinienne, les deux parties ont souligné l’impératif de lancer des efforts internationaux sérieux et actifs afin d’identifier une perspective politique véritable pour résoudre la Cause palestinienne sur la base de la solution à deux États, seule option à même de garantir une paix juste et globale ».

Les deux parties ont souligné « l'impératif qu'il y a à ce qu’Israël respecte le statut historique et juridique établi à Jérusalem et dans ses lieux saints, islamiques et chrétiens, ainsi que l'importance du rôle de la tutelle hachémite ».

S'agissant du volet économique, les deux pays ont mis l'accent sur l'importance d’œuvrer en commun pour élever le niveau de la coopération économique et le volume des investissements, faisons part de leurs aspirations à renforcer leur coopération dans le domaine de l'énergie propre.

Aussi bien à Amman qu’au Caire, des positions ont été affichées pour appuyer les efforts déployés par les Nations unies en vue de parvenir à une solution politique inclusive à la crise au Yémen, sur la base de l'initiative et des mécanismes exécutifs du Conseil de coopération du Golfe et des conclusions du Dialogue national yéménite ainsi que de la résolution numéro 2216 du Conseil de sécurité.

De même, des appels ont été lancés en vue d'intensifier les efforts pour identifier une solution politique à la crise syrienne, de nature à préserver l'intégrité territoriale du pays et rétablir la paix et la stabilité et à débarrasser le pays du terrorisme, tout en mettant l'accent sur l'aménagement des conditions nécessaires pour un retour volontaire et sécurisé de millions de réfugiés syriens.

Le prince héritier saoudien, Mohammed bin Salman, a conclu sa tournée en se dirigeant vers la Türkiye, troisième et ultime étape de sa tournée.

Des observateurs estiment que la visite du prince héritier saoudien à Ankara et sa rencontre avec le président Erdogan fondera une nouvelle phase dans les relations entre les deux pays, à la lumière des changements mentionnés plus haut, qu'il s'agisse de la guerre russe en Ukraine ou des développements des stratégies américaines dans la région du Moyen-Orient, ou encore de la réélaboration des alliances régionales et internationales.

Le communiqué commun turco-saoudien publié à l’issue de la visite, a mis l'accent sur la résolution des deux pays à lancer une nouvelle ère de coopération dans les relations bilatérales, y compris, politiques, économiques, militaires et sécuritaires, et leur volonté de travailler de concert pour développer des projets dans le domaine de l’énergie.

Ajoutons à cela, la possibilité de développer, de diversifier et de faciliter le commerce mutuel, en enlevant les embûches qui se dressent sur cette voie, tout en explorant les opportunités d'investissement et en assurant l'accroissement des échanges pour les transformer en des partenariats concrets.

Il est important de mettre en avant la détermination des deux pays à poursuivre et à développer la coopération sur les bases de la fraternité historique. Les deux pays sont convenus de réactiver l’action du Conseil de coordination saoudo-turc.

De plus, il a été convenu d’approfondir la concertation et la coopération au sujet des questions régionales afin de consolider la stabilité et la paix dans la région, tout en concrétisant les accords bilatéraux signés dans les secteurs de la défense, de nature à servir les intérêts des deux pays et à contribuer à garantir la sécurité et la stabilité de la région.

En marge de cette visite, le président du Conseil turc des relations économiques extérieures (DEIK), Nail Olpak, a souligné que la Türkiye et l’Arabie saoudite visent à atteindre un volume d’échanges commerciaux d’une valeur de 10 milliards de dollars, d’ici l’année 2023.

Des experts pensent que la réussite de cette visite impactera positivement sur plusieurs dossiers dans la région, au profit des deux pays ainsi que pour l’ensemble des Etats de la région, à travers l’établissement de nouvelles équations d’équilibre.

Ainsi, il est probable que la tournée du prince héritier saoudien constitue un prélude à l’élaboration d’une alliance régionale qui revêt des dimensions politiques et sécuritaires, en lien avec la visite attendue du président américain.

Globalement, la région traverse une situation sécuritaire difficile et fait face à des défis économiques et politiques, dans plus d’un pays de la région du Moyen-Orient.


*Traduit de l'arabe par Hatem Kattou

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