Politique

Réminiscences nazies en Israël

L’historien israélien Zeev Sternhell tirait déjà la sonnette d’alarme en février dernier, dans une tribune intitulée «En Israël pousse un racisme proche du nazisme à ses débuts ».

Qualid Filsde Mohamed Chine  | 24.07.2018 - Mıse À Jour : 25.07.2018
Réminiscences nazies en Israël

Ankara

AA/ Qualid Filsde

« Il n’y a pas de différence entre l’obsession hitlérienne de la race aryenne et la décision du gouvernement israélien de faire de ces terres antiques le domaine exclusif des Juifs ». C’est ce qu’a déclaré le président turc Recep Tayyip Erdogan, mardi, lors d’une réunion à Ankara, en référence à la loi israélienne sur « l’Etat-nation du peuple juif ».

La polémique suscitée par la loi adoptée par le Parlement israélien le 19 juillet courant, n’en finit pas de grossir.

"La terre d'Israël est la patrie historique du peuple juif, sur laquelle a été établi l'État d'Israël, l'État-nation du peuple juif, dans lequel il applique son droit naturel et l'autodétermination culturelle et historique", affirme la loi. Son texte dispose également que « l’Etat œuvre à encourager la colonisation juive » en Cisjordanie.

Or le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a considéré l’adoption de la loi controversée comme une application de la vision de Theodor Herzl, le « fondateur du sionisme».
« C’est un moment déterminant de l’histoire du sionisme et de l’Etat d’Israël », a lancé Netanyahu à la suite de l’adoption de ladite loi.

Et de marteler : « 122 ans après l’émergence de la vision de Herzl, nous avons déterminé par la loi la base de notre existence, Israël est l’Etat-nation du peuple juif ».

Des principes ouvertement discriminatoires qui ont provoqué un tollé. Le célèbre chef d'orchestre israélien Daniel Barenboim a considéré, dans un article publié par le journal « Haaretz », dimanche, qu’il s’agit « clairement d’une forme d’apartheid ». Le musicien a regretté que « le principe d'égalité et de valeurs universelles soit remplacé par le nationalisme et le racisme».

Pour sa part, le président turc a considéré, mardi : "Cette disposition est la preuve irréfutable qu'Israël est l'Etat le plus sioniste, le plus fasciste et le plus raciste du monde".

Or si la loi sur « l'État-nation du peuple juif », ravive les critiques contre Israël, les faits qui lui sont reprochés ne datent pas d’aujourd’hui.

L’historien israélien Zeev Sternhell tirait déjà la sonnette d’alarme en février dernier, dans une tribune intitulée «En Israël pousse un racisme proche du nazisme à ses débuts ».

« Il s’agit d’un acte constitutionnel nationaliste que le nationalisme maurassien d’antan n’aurait pas renié, que Mme Le Pen n’oserait pas proposer », affirme l’historien au sujet de la loi.

De son côté, Netanyahu ne s’était pas embarrassé de précautions rhétoriques en octobre 2015, en réduisant le rôle de Hitler dans la Shoah. Le Premier ministre israélien avait en effet déclaré à la tribune du 37 congrès de l’Organisation sioniste mondiale, qu’Hitler «ne voulait pas exterminer les Juifs à l’époque, seulement les expulser». A croire que les dérives hitlériennes trouvent désormais des justifications dans les rangs israéliens.

C’est que la question « raciale » revêt une importance grandissante en Israël.

« L'âme d'Hitler, qui a conduit le monde vers une grande catastrophe, se trouve de nouveau ressuscitée parmi certains dirigeants israéliens », a affirmé Erdogan, mardi. Une mise en garde qui a une résonnance particulière dans le contexte des dérives de Tel Aviv.

Et voici même que la génétique est instrumentalisée à des fins politiques obscures.

« Certaines percées récentes dans le domaine des tests génétiques ont amené des experts à établir un moyen de prouver la judéité à travers une simple analyse de salive ou de sang », affirme le très sérieux « Jerusalem Post » dans son édition française du 3 décembre 2017.

« Des avancées qui ont conduit le rabbin Yosef Carmel, codirecteur de l’Institut Eretz Hemdah pour les études juives avancées, ainsi qu’un illustre juge du tribunal rabbinique Eretz Hemdah de Jérusalem, à affirmer que de tels tests pourraient être utilisés comme preuve de l’ascendance juive de certains Ashkénazes », note le même article.

La judéité, et par-delà, la citoyenneté israélienne, devrait donc d’abord s’inscrire dans le patrimoine génétique.

En définitive, la loi sur « l’Etat-nation du peuple juif », vivement critiquée par le président turc, entérine une dérive raciste enracinée dans la réalité historique d’Israël.

Des documents d’archives israéliennes ont confirmé que des milliers d’enfants juifs d’origine yéménite ont été enlevés par les autorités. Dans les années 50 du siècle dernier, quelque « 3500 à 5000 enfants ont disparu sans laisser de trace dans des hôpitaux et déclarés morts », affirme le journal helvétique « Le Temps », dans un article publié le 17 décembre 2017.

« Certains disparus ont succombé durant des expériences médicales pour lesquelles ils ont servi de cobaye humain », précise le quotidien, citant un député du Likoud.

« D’autres documents datant de 1949 et de 1950 prouvent que les hommes en blanc ont cherché à savoir si les Yéménites avaient «du sang nègre», affirme le journal.

Comme si les immondes « expériences » menées par le médecin nazi Josef Mengele sur les Juifs, ne devaient pas rester à jamais dans les poubelles de l’histoire. Et voici que la nouvelle loi israélienne ôte le couvercle, laissant jaillir les réminiscences pestilentielles.

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