Industrie française : Macron défend une politique de “protection” face à la concurrence mondiale
– Le Président français a plaidé pour une stratégie industrielle plus défensive, évoquant une surproduction chinoise et les dérives du e-commerce.
Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Le chef d'État français Emmanuel Macron a affirmé vendredi la nécessité d’« assumer une politique de protection de notre industrie ».
À l’occasion de l’inauguration de la cinquième édition de la Grande exposition du fabriqué en France, à l’Élysée, le Président français a dénoncé la « brutalité des échanges commerciaux » et la « concurrence déloyale », notamment face ce qu'il a qualifié de surproduction chinoise et à l’explosion des colis importés.
Dans ce contexte, la présidence de la République française a souligné l’importance de préserver les capacités industrielles françaises, rappelant que « quatre milliards de petits colis ont été importés en 2024 », posant un défi inédit pour le secteur manufacturier local. Macron a affirmé que des « premières mesures de protection » ont été prises, sans en détailler le contenu.
Cette prise de position semble marquer un glissement sémantique vers un discours plus souverainiste, en rupture partielle avec les années précédentes. Le Président français s’est également félicité d’avoir « stoppé 12 ans de désindustrialisation » et d’avoir contribué à faire baisser le chômage. Il a assuré que la politique industrielle menée depuis 2017 a permis « un regain d’attractivité » et renforcé l’« indépendance » économique de la France.
Selon les chiffres de l’Insee, la part de l’industrie manufacturière dans le PIB français est passée de 13,8 % en 2017 à 12,7 % en 2022. La France reste loin derrière l’Allemagne, où ce taux dépasse les 20 %. En dépit d’efforts récents de réindustrialisation — avec les annonces de projets comme ceux de batteries électriques ou de semi-conducteurs — la France continue de perdre des capacités productives dans des secteurs stratégiques, notamment la chimie et la métallurgie.
Dans une interview accordée à Public Sénat, le président du Medef Patrick Martin a dénoncé une « inconscience coupable » de la France et de l’Europe vis-à-vis de la sidérurgie, estimant que des pans entiers de l’industrie restent trop exposés à la concurrence asiatique. Le syndicat France Industrie, de son côté, plaide depuis plusieurs mois pour un meilleur ciblage des aides publiques et un renforcement des protections commerciales au niveau européen.
À gauche, les réactions sont plus tranchées. La coalition Nouveau Front populaire (NFP), qui a succédé à la Nupes, accuse l’exécutif d’avoir multiplié les déclarations sans effets concrets. Le député écologiste Benjamin Lucas dénonce une « communication hors-sol » : « L’industrie française continue de décliner, les emplois industriels disparaissent, pendant que Macron promet des protections qu’il ne met jamais en œuvre. »
La CGT, de son côté, réitère ses « six revendications pour l’industrie » dans une note publiée fin octobre, alertant sur la multiplication des plans sociaux et la précarisation des salariés. Le syndicat réclame notamment un renforcement de la commande publique en faveur des productions locales, ainsi qu’un moratoire sur les fermetures de sites industriels viables.
Le discours protectionniste de l’exécutif français devra également se conjuguer avec les règles du marché unique européen. Pour rappel, Bruxelles a déjà engagé plusieurs enquêtes anti-subventions, notamment contre des entreprises chinoises dans les secteurs du rail et de l’automobile. Mais les marges de manœuvre restent limitées : toute hausse des droits de douane ou politique de préférence nationale doit s’inscrire dans le cadre commun.
