AA / Desk / Lassaad Ben Ahmed
Alors que l’année scolaire en Tunisie s’approche progressivement de sa fin et les futurs bacheliers passent déjà leur «bac-sport», la situation s’est compliquée davantage dans l’enseignement secondaire, mardi 17 avril, avec la suspension des cours par le syndicat des enseignants.
Plus que jamais, les élèves et leurs familles craignent une année blanche aux conséquences dévastatrices, aussi bien pour les apprenants que pour le système éducatif dans son ensemble. Ils se sentent, du reste, victimes d’un bras de fer dans lequel ils n’y sont pour rien.
Les enseignants tiennent bon dans leurs revendications à caractère financier et le ministère de tutelle ne veut pas engager des pourparlers sous la menace d’un «dictat syndical».
Le différend remonte au début de l’année en cours, lorsque le syndicat des enseignants du secondaire a mis sur la table un pack de revendications et décidé de prendre en otage les notes des élèves jusqu’à obtenir gain de cause.
Il s’agit, entre autres, de l’augmentation de certaines primes, de l’amélioration des conditions de l’enseignement dans les établissements publics et surtout de la reconnaissance de l’enseignement comme «métier pénible».
Ceci, sans compter la régularisation de la situation des suppléants, dont le salaire de certains ne dépasse pas les 400 dinars par mois (environ 166 dollars).
Face à ces revendications, le ministre de l’Education, Hatem Ben Salem, a refusé tout dialogue avec le syndicat, jusqu’à la remise des notes aux administrations, la tenue des conseils de classes et, par là, la clôture du premier semestre.
Et le blocage de durer plusieurs semaines, jusqu’à la tenue de la commission administrative de la fédération de l’enseignement secondaire relevant de la puissante Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui a décidé de suspendre les cours à partir du 17 avril.
Une «escalade» qui a eu rapidement la réplique du ministère qui a décidé, pour sa part, de procéder à des retenues sur les salaires des enseignants grévistes, à hauteur des journées chômées, selon un communiqué rendu public, la veille.
Pour sa part, l’Association des parents d’élèves a appelé les tuteurs et les parents d’élèves à se rassembler le 17 avril devant les collèges et les lycées pour protester contre le blocage des notes et le risque d’une année blanche.
Elle a également appelé à porter plainte contre les enseignants qui refuseraient toujours de rendre les notes à l’administration.
D’après Chawki Gueddas, président de l’Instance nationale de protection des données personnelles, la retenue des notes (données personnelles appartenant à l’élève) est une infraction passible de plusieurs mois d’emprisonnement selon les textes en vigueur.
Dans ce désordre inédit en Tunisie, la guerre des déclarations bat son plein sur les radios, les plateaux télévisés et la presse écrite et électronique. Le syndicat tout comme le ministère de tutelle se rejettent mutuellement la responsabilité et promettent de faire en sorte de sauver l’année scolaire menacée.
Lassaad Yaacoubi, secrétaire général de la Fédération de l’enseignement secondaire a appelé ses collègues, sur les ondes d’une radio privée, à la résistance et à une victoire certaine et imminente.
De son côté, Hatem Ben Salem, ministre de l’Education s’est excusé du désordre et de l’incertitude causés par cette crise, promettant qu’il n’y aura pas d’année blanche, sur une web radio créée par son département pour communiquer avec les élèves et la famille éducative.
Entre-temps, les journées passent rapidement et le sentiment d’amertume s’approfondit davantage poussant de plus en plus de Tunisiens à fuir vers l’enseignement privé.
Certains parents préfèrent casquer, en effet, plutôt que d’être embourbés dans de tels pétrins et c’est peut-être la finalité recherchée, n’en déplaise à un enseignement démocratisé, n’en déplaise aux politiciens qui s’attachent toujours à un enseignement public gratuit et de qualité...