Monde, Analyse

Les révolutions populaires à l’ère néo-libérale en débat à Tunis

-La justice sociale, facteur essentiel du succès de la révolution tunisienne (analyste)

1 23  | 18.01.2019 - Mıse À Jour : 18.01.2019
Les révolutions populaires à l’ère néo-libérale en débat à Tunis

Tunis

AA/Tunis/ Bouazza Ben Bouazza

Huit ans après où en est la révolution tunisienne et, par extension, les révolutions dites du “printemps arabe”? Ont-elles atteint leurs objectifs ou certains d’entre eux? Quelles en sont les perspectives?

C’est à cette problématique que plusieurs penseurs, universitaires et acteurs de la société civile ont tenté d’apporter des réponses lors d’un séminaire organisé vendredi à Tunis, par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), avec le concours de la fondation allemande Friedrich-Ebert, sur le thème “Les révolutions populaires à l’ère néo-libérale: succès, échecs et alternatives”.

Le président du FTDES, Messaoud Romdhani a commencé par faire remarquer que ces révolutions sont venues “dans un temps difficile, celui du néo-libéralisme, qui jure avec la justice sociale”.

De ce fait, elles se situent, selon lui, “à contre-courant du processus révolutionnaire historique”.

Aussi, ne manque-t-il pas d’attribuer les trébuchements auxquels se heurte “la révolution du jasmin” notamment au fait qu’elle a été initiée “par des gens ordinaires”, en l’absence d’encadrement politique et loin de toute idéologie et sans vision d’avenir.

L’écrivain Chokri Mabkhout fait valoir, dans ce sillage, que la révolution tunisienne constitue en fait “une continuité” des mouvements révolutionnaires entamés dans les années 30 et a pris une dimension nationale avec le poète Aboulkacem Chebbi et son célèbre vers “si le peuple veut …”. C’est là, de son point de vue, “le point de départ de l’émergence de la personnalité tunisienne”.

“La rupture ne s’est concrétisée en réalité que partiellement, essentiellement en ce qui concerne la structure politique, ce qui a suscité un sentiment de déception, d’une part, et confirmé l’existence d’une forme de continuité dans différents domaines, d’autre part”, opine-t-il.

Avant de s’interroger: “sommes-nous devant une impasse du processus révolutionnaire ou devant l’absence de “vraies” forces révolutionnaires? Est-ce le retour de la contre-révolution et de l'ancien régime?”.

Dans sa communication intitulée “acteurs de la révolution … les oubliés de la révolution”, le géographe Habib Ayeb, a axé son propos sur les agriculteurs en présentant un tableau bicéphal, paradoxal, entre ceux qui produisent la richesse (agricole) et ceux qui en profitent (les hommes d’affaires).

A ses yeux, les premiers acteurs de la révolution que sont les ouvriers des mines, les paysans de Sidi Bouzid et d’ailleurs, les jeunes chômeurs des régions les plus marginalisées, demeurent des “oubliés” et leurs revendications “le pain, la justice sociale et la dignité”, insatisfaites.

L’universitaire et écrivain irano-américain Asef Bayat qui a traité du thème “Le printemps arabe : Révolutions aux temps néolibéraux”, a fait observer que “la montée des soulèvements dans le monde arabe a donné lieu à un optimisme sans précédent en matière de démocratie et de développement dans le monde arabe”.

Il a noté que ce mouvement a, cependant “très rapidement été suivi d’un fort sentiment de pessimisme et de désespoir au vu de l’évolution de ces soulèvements populaires”.

En analysant les causes, il a estimé que “les événements en Tunisie, en Égypte ou au Yémen en 2011 n’étaient pas des révolutions radicales dans le sens de celles du 20e siècle, comme ceux en Iran ou au Nicaragua en 1979”.

Il a qualifié plutôt de “refo-lutions” qui tentaient de forcer les régimes à se réformer. Cependant, Selon lui, ces mouvements ont créé peu de changements réels au niveau structurel, notamment au niveau économique et demeurent vulnérables aux processus contre-révolutionnaires.

Aussi, considère-t-il que “les défis clés à présent, pour le cas de la Tunisie, sont d’approfondir la transition démocratique et ouvrir la voie pour une justice sociale, tout en préservant la sécurité du pays des menaces et interventions extérieures”.

Pour Messaoud Romdhani, le succès de la révolution, en particulier en Tunisie, reste lié à “la réalisation de la justice sociale, l’une des principales revendications de ses auteurs, faute de quoi, tout ce qui a été accompli jusqu’ici au plan démocratique, des droits et des libertés risque d’être compromis, voire mis en cause”.


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