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L'Afghanistan espère que la réunion d'Istanbul débouchera sur des "progrès tangibles"

- Le président du Haut Conseil pour la réconciliation nationale, Abdullah Abdullah, exhorte les talibans à mettre à profit la réunion d'Istanbul pour parvenir à un retrait des troupes étrangères.

Mourad Belhaj  | 23.03.2021 - Mıse À Jour : 23.03.2021
L'Afghanistan espère que la réunion d'Istanbul débouchera sur des "progrès tangibles"

Moskova

AA / Moscou

Abdullah Abdullah, président du Haut Conseil pour la réconciliation nationale (HCNR), qui conduit les pourparlers de paix au nom du gouvernement afghan, a déclaré espérer un "progrès tangible" vers un accord lors de la réunion d'Istanbul, prévue en avril.

Dans un entretien exclusif accordé à l'Agence Anadolu, Abdullah Abdullah a déclaré que la présence de décideurs à la réunion doit être mise à profit pour progresser dans le règlement des problèmes auxquels l'Afghanistan est confronté.

"Il y a eu beaucoup de discussions entre les deux parties au cours des derniers mois à Doha. Le processus de Doha va se poursuivre, puis nous aurons la réunion d'Istanbul qui se tiendra à un haut niveau. Il y aura de hauts dirigeants afghans et talibans - c'est ainsi qu'elle a été planifiée", a déclaré Abdullah, qui a également occupé le poste de chef de l'exécutif afghan de 2014 à 2020.

Le président du HCNR a insisté pour que cette opportunité à Istanbul ne soit pas une énième occasion de faire des discours, mais plutôt d'œuvrer pour parvenir à quelques "progrès tangibles."

"Bien évidemment, l'accord définitif, et final, prendra du temps, mais nous devrions au moins nous mettre d'accord sur quelques principes. Et un accord sur un cessez-le-feu serait très important", a ajouté Abdullah.

Et de souligner qu'il était temps d'aller plus loin que l'accord entre les États-Unis et les talibans signé à Doha en 2020, qui prévoit le retrait des troupes américaines d'Afghanistan à la date du 1er mai. Il a ainsi proposé qu'un accord soit directement conclu entre le gouvernement afghan et les talibans.

Le président du Haut Conseil pour la réconciliation nationale en Afghanistan, a déclaré que la volonté des talibans d'aller de l'avant serait testée dans les prochains jours, soulignant que le gouvernement de Kaboul est prêt à conclure des accords directs.

"En fin de compte, il faut qu'il y ait un accord global entre nous. Il y a un processus entre les États-Unis et les talibans, mais en définitive, nous devons nous mettre d'accord. Il reste à savoir si les talibans sont prêts. Cela sera vérifié avant la réunion prévue en Turquie", a déclaré Abdullah.

Interrogé sur une éventuelle offensive que les Talibans pourraient lancer si les Etats-Unis ne remplissent pas leurs obligations, Abdullah a déclaré que les parties afghanes ne devraient pas dépendre des Etats-Unis et devraient travailler ensemble pour obtenir le retrait des troupes étrangères du pays.


- Faire régner la paix pour le retrait des troupes étrangères

"Cette menace [de reprise des hostilités par les talibans] est regrettable, car nous devrions finir par régler ce problème entre nous. Nous devrions trouver une solution qui convienne aux deux parties. Et si la paix règne, alors la présence des troupes internationales n'est plus nécessaire", ajoute le président du HCNR.

Et d’expliquer : "Dans un Afghanistan pacifié, pourquoi aurions-nous besoin de troupes internationales ? Si tel est l'objectif des Talibans, à savoir qu'il ne devrait plus y avoir de troupes étrangères en Afghanistan, le moyen d'y parvenir est de travailler ensemble en tant qu'Afghans et de préparer le terrain pour cela. Tel est mon message".

Selon lui, la nouvelle administration américaine maintiendra le cap en ce qui concerne le processus de paix en Afghanistan.

"En ce qui concerne le soutien au processus de paix, la politique américaine est la même. Ils soutiennent le processus de paix. Mais ils veulent aussi que des arrangements militaires soient conclus, si ce n'est demain, (que ce soit) alors dans un avenir proche. Ils doivent également répondre à l'urgence de la paix. Il est plus urgent pour le peuple afghan de parvenir à la paix car il souffre. Si cela devait se concrétiser, ils poursuivront leurs efforts et intensifieront leurs actions avec les pays de la région. Ils tiennent à ce que les Nations unies soient impliquées dans ce processus, et nous continuerons à travailler avec eux", a déclaré Abdullah.

Il a admis que le gouvernement afghan avait un point de vue différent sur certains points, notamment l'idée d'un gouvernement intérimaire, ce dont Washington a été clairement informé.

Le président du HCNR a souligné que le gouvernement de Kaboul était favorable à la signature d'un accord avec les talibans avant la tenue d'élections. Il a qualifié cette position de "position de principe".

"Il est très prématuré d'en parler [du gouvernement intérimaire]. Ces questions ont été soulevées et font également partie de ce document qui nous a été communiqué par les Américains et auquel nous avons répondu", a-t-il déclaré.

Abdullah Abdullah a rappelé que les Talibans n'ont pas encore répondu à la lettre du Département d'Etat américain, ajoutant que le gouvernement de Kaboul avait signalé des lacunes et exprimé des réserves sur certains aspects de la lettre.

"Nous avons dit que cela aiderait si nous pouvions nous mettre d'accord sur certains arrangements avant de participer à des élections auxquelles participeraient les talibans. Si ces derniers souhaitent aller directement aux élections, conclure un accord et organiser un second scrutin, cela n'est pas non plus impossible. Pour autant que nous parvenions à un accord", a-t-il déclaré.

S’agissant de la réunion qui s'est tenue à Moscou les 18 et 19 mars, Abdullah a déclaré que les parties ont profité de l'occasion pour échanger des vues sur différents points de manière informelle, afin de mieux comprendre les positions et les préoccupations des uns et des autres.


- La réunion de Moscou est positive et satisfaisante

Le président du HCNR a également ajouté que les talibans sont entrés en Russie munis de passeports afghans délivrés par l'ambassade d'Afghanistan au Qatar, afin que les membres de l'équipe de négociateurs puissent être présents à la table de conférence pour discuter de la paix en Afghanistan.

"Les talibans ont exposé leurs points de vue, et nous avons exposé les nôtres. Et nous avons eu l'occasion de nous réunir. Il ne s'agissait pas d'une négociation mais, dans un sens, les deux parties se trouvent au même endroit, alors pourquoi ne pas se réunir, pour échanger quelques idées de manière informelle", a-t-il déclaré.

Selon Abdullah Abdullah, la déclaration adoptée à l'issue de la réunion peut être qualifiée de "bonne", car elle répond aux attentes du peuple afghan.

"Les parties auraient dû saisir l'occasion qui se présentait. D'autant que le monde entier et le peuple afghan nous exhortent à parvenir à un cessez-le-feu et à un règlement de paix global", a-t-il déclaré.

Et d'ajouter que le message de ces pays qui ont participé à la "troïka" élargie, comprenant la Russie, la Chine, les États-Unis et le Pakistan, a réclamé ce que le peuple afghan demande.

"Le message adressé aux deux parties était très clair. Je pense que cela va aider. Mais cela dépend encore une fois des deux parties", a déclaré le président du HCNR.

Les États-Unis ont envahi l'Afghanistan après les attaques du 11 septembre 2001. En dix-neuf ans, la présence américaine et les conflits qui en découlent ont coûté la vie à plus de 100 000 civils et forcé des millions de personnes à quitter leur foyer en Afghanistan.

Les Nations unies n'ont cessé d'insister depuis pour que les opportunités de paix dans la région soient saisies.


*Traduit de l’Anglais par Mourad Belhaj

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