Politique, Monde

Jérusalem – Décision de Trump : Réprobation et condamnation quasi-unanime dans le monde

- Le président américain isolé et lâché même par les alliés des USA

Lassaad Ben Ahmed  | 07.12.2017 - Mıse À Jour : 07.12.2017
Jérusalem – Décision de Trump : Réprobation et condamnation quasi-unanime dans le monde

Tunisia

AA / Tunis /Bouazza Ben Bouazza

La décision du président américain de reconnaître « officiellement » Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y transférer l’ambassade de son pays a soulevé un tollé jamais enregistré de par le monde.

Des quatre coins de la planète, la communauté internationale a, d’une même voix, fait part de son inquiétude et de sa profonde préoccupation, quant aux conséquences dangereuses de l’initiative du locataire de la Maison Blanche sur la sécurité et la stabilité régionale et internationale.

Même les alliés traditionnels des Etats-Unis occidentaux et autres du Proche-Orient se sont démarqués de Donald Trump qui s’est retrouvé isolé sur la scène internationale.

Considérée comme son plus fidèle partenaire, la Grande-Bretagne a ouvertement marqué ses distances de Washington. « Nous n’avons pas l’intention de déplacer notre ambassade », a tranché le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson.

Même son de cloche du côté des Nations-Unies et de l’Union européenne qui, loin d’approuver la décision controversée du turbulent Trump, ont plaidé pour un règlement du statut de la ville sainte dans le cadre de négociations entre Palestiniens et Israéliens, « sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité », selon les termes du porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

«Il faut trouver par l’entremise des négociations, un moyen de résoudre le statut de Jérusalem en tant que future capitale des deux Etats (palestiniens et israélien) afin que les aspirations des deux parties puissent être satisfaites», a déclaré la cheffe de la diplomatie de l’UE, Federica Mogherini.

Réaction hostile aussi de la France, un autre allié des USA ; le président Emmanuel Macron n’y est pas allé par quatre chemins.

Il a qualifié de « regrettable la décision américaine qui contrevient au droit international et aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU», en rappelant «l’attachement de son pays et de l’Europe à la solution des deux Etats, vivant côte à côte en paix et en sécurité dans de frontières internationalement reconnues ».

Le pape François a, quant à lui, dit qu’il «ne pouvait pas taire sa profonde inquiétude » face à la situation engendrée par la décision de Trump.

«Jérusalem est une ville unique, sacrée pour les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans, qui y vénèrent les lieux saints de leurs religions respectives et a, de ce fait, une vocation spéciale pour la paix », a insisté le pape.

La Chine s’est dite inquiète « d’une possible escalade des tensions ». Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Geng Shuang, a appréhendé «une nouvelle confrontation dans la région».

- Colère dans le monde arabo-musulman

De vives réactions ont été aussitôt enregistrées du côté des pays musulmans où la décision américaine a suscité la colère.

Pour le président Recept Tayyp Erdogan, « Jérusalem est une ligne rouge pour les Musulmans». Aussi, a-t-il invité les dirigeants des pays membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) à tenir, mercredi prochain à Istanbul, un sommet extraordinaire sur Al Qods (Jérusalem).

Selon son porte-parole Ibrahim Kalin, le chef de l’Etat turc, en sa qualité de président en exercice de l’OCI, convoque ce sommet pour permettre aux pays musulmans d’agir de façon unifiée face aux derniers développements.

La considérant de «nulle et non avenue», le premier ministre turc Binali Yildrim, a averti que la décision «grave» de Donald Trump «peut avoir de lourdes conséquences».

Pour Binali Yildrim, «jouer» avec le statut de Jérusalem, ville sainte pour les trois religions monothéistes, peut avoir les mêmes conséquences qu’une « grenade dégoupillée » et « sera l'auspice d'une catastrophe" et « provoquera davantage le terrorisme mondial ».

Le roi Salmane Ibn Abdelaziz d’Arabie Saoudite a, pour sa part, mis en garde contre «la colère des Musulmans», tant Jérusalem, qui abrite le troisième lieu saint de l’Islam, est « un cri de ralliement pour les Musulmans ».

Chez les Palestiniens, c’est une levée de boucliers qui préfigurent d’un embrasement de la situation.

Signe précurseur, le dirigeant du mouvement islamiste Hamas Ismail Haniyah a appelé à un nouveau «soulèvement » (intifada), pour vendredi.

Dans un discours prononcé, dans son bureau à Gaza, il a décrété «la fin du processus de paix».

«Nous revendiquons à l’autorité palestinienne d’annoncer son retrait de l’accord d’Oslo (accord de paix signé entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine en 1993) », a-t-il asséné.

Pour le mouvement islamiste Hamas, Donald Trump a ouvert «les portes de l’enfer» pour les intérêts américains dans la région.

Haniyeh a appelé, d’une autre part, les dirigeants palestiniens et arabes à boycotter «l’Administration américaine», soulignant que le peuple palestinien est placé face à un «tournant historique par lequel passe la Cause Palestinienne, Jérusalem et la communauté arabo-musulmane, à la suite de la décision américaine».

«L’occupation israélienne n’a aucune légitimité sur les terres palestiniennes», a-t-il clamé, mettant l’accent sur la nécessité d’accélérer l’application de la réconciliation palestinienne et de l’union nationale, comme sur la nécessité de dépasser la phase de la division et de mettre en place une stratégie pour faire face à Israël.

Tout comme l’Emir du Qatar, Haniyeh a salué l’appel du président turc Recep Tayyip Erdogan à tenir un sommet islamique pour examiner la décision américaine sur Jérusalem.

Déjà mercredi soir, peu après l’annonce de la décision américaine, des centaines de palestiniens ont manifesté dans la Bande de Gaza, en brûlant des drapeaux américains et israéliens, ainsi que des portraits de Donald Trump.

Jeudi, une grève générale a paralysé la Cisjordanie occupée et des rassemblements de masse ont eu lieu au cours desquels les manifestants ont exprimé leur colère et leur rejet de la décision américaine.

Selon le correspondant d’Anadolu, les magasins, les institutions privées et publiques étaient fermés et les rues étaient vides de piétons.

Les universités et les écoles palestiniennes ont également annoncé leur adhésion à ce mouvement.

- Les réactions se font rares en Afrique

En Afrique, les réactions des pays du continent se sont faites rares, hormis les pays nord-africains.

La Ligue arabe, qui compte 10 Etats membres africains, se réunit samedi, et l'OCI, dont une trentaine de pays d'Afrique font partie, le 13 décembre. En principe, les Palestiniens devraient pouvoir compter sur certaines des 22 capitales africaines qui abritent une de leurs ambassades.

Pourtant, les chancelleries subsahariennes ne se précipitent pas pour commenter la décision américaine. Certains observateurs y voient une volonté de ne pas froisser Israël qui multiplie les tentatives de séduction en Afrique.

D’autres l’attribuent au souci de ménager le partenaire américain qui finance pour 60 millions de dollars l’intervention dans le cadre du G5 Sahel et globalement 5,2 milliards de dollars d'aide à l’Afrique subsaharienne en 2018.

S’agit-il de « ménager la chèvre et le chou ?», s’interroge un de ces observateurs.

Le Sénégal semble faire l’exception. Au pays de la Terenga qui préside depuis 1975 le comité des Nations-unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, le coordinateur du collectif « Solidarité Sénégal Palestine », Madieye Mbodj a « condamné fermement » la décision du président Trump.

« Si nous laissons Donald Trump violer des résolutions internationales qui dénonçaient, justement, la colonisation israélienne, y compris l’occupation de Jérusalem, nous pensons que ce serait une grave violation des droits du peuple palestinien, mais surtout, une incitation à la guerre», a-t-il affirmé.

Néanmoins, la commission de l'Union africaine a regretté « une décision qui ne fera qu'accroître les tensions dans la région et au-delà ».

L'UA qui réitère sa solidarité avec le peuple palestinien et son soutien à sa quête d’un État indépendant ayant Jérusalem-Est comme capitale.

Le Maroc, qui préside le comité Al Qods (Jérusalem) au sein de l’OCI a convoqué le chargé d'affaires américain à Rabat pour lui exprimer sa « profonde inquiétude ». La Tunisie a dénoncé une « atteinte primordiale au statut juridique et historique de la ville et une violation des décisions de l'ONU ».

La décision de Trump a suscité une forte indignation et une grande mobilisation populaire à Tunis et dans les régions de l'intérieur du pays où des manifestations ont commencé jeudi.
Vendredi, un grand rassemblement est prévu à l'appel de la puissante centrale syndicale, l'UGTT, et des partis politiques et de la société civile.

Quant à l'Algérie, elle «en appelle à la nation arabe, la Umma islamique, et à la communauté internationale, à se mobiliser pour le respect des droits nationaux des Palestiniens et du statut international de la ville sainte ».

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