Expulsée de son logement social à 77 ans à Reims, une retraitée se retrouve à la rue
– À la veille de l’hiver, Mireille, 77 ans, a été expulsée de son logement social malgré une situation de grande précarité.
Ile-de-France
AA / Paris / Ümit Dönmez
Mireille, locataire d’un appartement social à Reims depuis de nombreuses années, a été expulsée en novembre 2025 à l’issue d’une procédure judiciaire initiée par le bailleur Reims Habitat. À 77 ans, cette retraitée se retrouve sans domicile, après une longue période de surendettement marquée par des difficultés financières persistantes.
Selon l'information rapportée par France 3 Grand Est, il ressort que Mireille vivait avec environ 1 000 euros par mois. Après avoir payé un loyer de 400 euros, les charges (électricité, chauffage, téléphone) devenaient difficilement supportables. « Quand tout augmente, vous êtes étranglée », témoigne-t-elle, précisant qu’il faudrait entre 1 200 et 1 400 euros mensuels pour vivre dignement seule.
La résiliation de son bail, décidée par un juge plusieurs mois auparavant, n’a pas été contestée à temps. Son fils explique que sa mère sortait alors d’un séjour à l’hôpital, où elle avait été soignée pour un cancer du rein. À sa sortie, elle apprend que le jugement de résiliation est devenu définitif, faute de recours dans le délai légal de deux mois. Cette absence de recours a ouvert la voie à l'expulsion, effective quelques jours avant le début de la trêve hivernale, période pendant laquelle les expulsions sont normalement suspendues.
Reims Habitat indique avoir tenté à plusieurs reprises d’instaurer un plan d’apurement de la dette locative, en vain. Malgré quelques versements, les engagements n’ont pas été tenus. Le président du conseil d’administration estime que la décision d’expulsion est le résultat d’une procédure « équitable » au regard des autres locataires.
De son côté, le fils de Mireille souligne que sa mère a bénéficié d’une procédure de surendettement auprès de la Banque de France, qui a conduit à l’effacement de sa dette locative. Il rappelle que cet effacement n'annule pas une résiliation judiciaire déjà prononcée, ce qui a transformé sa mère en « occupante sans droit ni titre ». Il regrette également que la demande de logement social prioritaire (DALO) ait été rejetée, au motif qu'elle résidait encore dans les lieux — une situation devenue paradoxale une fois l'expulsion exécutée.
Aujourd’hui, Mireille est temporairement hébergée chez sa fille après avoir passé quelques jours en foyer et à l’hôtel. Elle dit se sentir « effacée de la société ». Son fils continue de chercher une solution de relogement, tout en dénonçant un système qu’il juge inadapté face aux fragilités des personnes âgées précaires.
Cette affaire individuelle s’inscrit dans une réalité bien plus vaste. Selon les dernières estimations, la France compterait aujourd’hui environ 330 000 à 350 000 personnes sans domicile, soit plus du double par rapport à 2012. En parallèle, le nombre d’expulsions locatives avec intervention des forces de l’ordre a atteint un niveau record en 2024, avec plus de 24 500 ménages concernés, en hausse de 29 % sur un an. Ces chiffres traduisent une aggravation continue de la crise du logement et de la précarité résidentielle, dans un contexte où le mal-logement touche des millions de personnes.
