Soudan : l’ONU Femmes dénonce l’usage délibéré et systématique du viol
- Motafati alerte sur les atrocités commises par les Forces de soutien rapide au Soudan : viols systématiques, exécutions sommaires et privation des besoins essentiels frappent quotidiennement les femmes et les filles d’El Fasher et du Darfour
Istanbul
AA / Istanbul / Adel Abdelrheem
L'ONU Femmes a condamné mardi les « crimes des Forces de soutien rapide » au Soudan, affirmant que le viol y est utilisé « délibérément et systématiquement ».
Les Forces de soutien rapide se sont emparées d'El Fasher, « commettant de graves atrocités, notamment des exécutions sommaires et des violences sexuelles ». Selon le rapport de l’organisation de l'ONU, le corps des femmes est devenu un véritable lieu de crime.
Dans un rapport publié à Genève, l'organisation a noté que les Forces de soutien rapide (FSR) ont pris El Fasher, capitale de l'État du Darfour-Nord (ouest du Soudan), le 26 octobre, après un siège de plus de 500 jours.
« Face à cette situation dramatique, la violence doit cesser et l’accès humanitaire doit être élargi de toute urgence. chaque jour où la communauté internationale tarde à agir, des femmes accouchent sous les bombardements, enterrent leurs enfants victimes de la faim ou disparaissent », ajoute-t-il le rapport.
Les souffrances humanitaires du peuple soudanais sont exacerbées par la guerre qui oppose l'armée aux Forces de soutien rapide depuis avril 2023, faisant des dizaines de milliers de morts et environ 13 millions de déplacés.
Le rapport indique avoir reçu des « informations faisant état d'atrocités, notamment des exécutions sommaires et des violences sexuelles », et que des preuves de plus en plus nombreuses montrent que le viol est utilisé « délibérément et systématiquement ».
Suite à la publication du rapport, Anna Motafati, directrice régionale de l'organisation pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe, a mis en garde contre les conséquences d'un retard dans la fin de la guerre.
Elle a déclaré que chaque jour, « le monde tarde à agir au Soudan, une femme accouche sous les bombardements, enterre son enfant de faim ou disparaît sans que justice soit rendue ».
Elle a ajouté : « Des femmes ont témoigné avoir souffert de la faim, des déplacements forcés, des viols et des bombardements à El Fasher, épicentre de la dernière catastrophe au Soudan.»
Motafati a poursuivi : « Après le pillage et la destruction des dernières maternités, des femmes enceintes ont accouché dans la rue.»
La directrice régionale a souligné que « des milliers de femmes et de filles ont fui la ville face à la détérioration de la situation, se réfugiant dans d’autres régions du Nord-Darfour, notamment à Tawila, à environ 70 kilomètres de là, à Korma et à Mellit.»
Elle a ajouté : « Les femmes nous racontent que, durant leurs périples éprouvants, chaque pas pour aller chercher de l’eau, ramasser du bois ou faire la queue pour de la nourriture comportait un risque élevé de violences sexuelles.»
Elle a insisté sur le fait que le corps des femmes « est devenu une scène de crime au Soudan » et qu’« il n’existe plus aucun lieu sûr » où elles puissent se protéger ou bénéficier d’un soutien psychosocial de base.
Mutafati a évoqué les « choix impossibles » auxquels sont confrontées les familles « contraintes de choisir entre se nourrir, se soigner et préserver leur dignité.»
Elle a affirmé que les besoins fondamentaux des femmes et des filles « sont les derniers de la liste ».
« La plupart des femmes et des filles ne mangent peut-être pas du tout. Les femmes sautent souvent des repas pour que leurs enfants puissent manger », a ajouté la responsable de l'ONU.
Elle a averti que la faim dont souffrent les femmes a un « effet multiplicateur », les agents de santé signalant une augmentation des cas de malnutrition aiguë sévère chez les nourrissons.
Elle a expliqué que cela est « souvent lié à la capacité réduite des mères affamées d'allaiter ».
Elle a appelé à la fin des violences, à un accès humanitaire élargi et à un soutien accru aux soupes populaires gérées par des femmes et aux autres organismes d'aide.
Face à ces atrocités, le commandant des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdan Dagalo (Hemedti), a reconnu le 29 octobre que ses forces avaient commis ce qu'il a qualifié d'« exactions » à El Fasher, affirmant que des commissions d'enquête avaient été mises en place.
Ces forces occupent les cinq États du Darfour, à l'ouest, sur un total de 18 que compte le pays. L'armée contrôle la majeure partie des 13 autres États, situés au sud, au nord, à l'est et au centre, y compris la capitale, Khartoum.
La région du Darfour représente environ un cinquième de la superficie du Soudan, qui s'étend sur plus de 1,8 million de kilomètres carrés, mais la majorité des 50 millions d'habitants du Soudan vivent dans des zones contrôlées par l'armée.
* Traduit de l'Arabe par Mariem Njeh
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