Libye : "Soudaines et terrifiantes", les inondations de Derna perçues par des survivants (reportage)
- Les témoignages des survivants des inondations catastrophiques survenues à Derna racontent leurs expériences terrifiantes

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AA / Tripoli / Muetaz Wannes
"Nous avons entendu le bruit d'une grande explosion et ensuite nous n'avons plus rien su". C’est par ces termes que les survivants de la ville libyenne de Derna ont raconté ce qui s'est passé lors de la tempête méditerranéenne Daniel, qui s’est abattue sur plusieurs villes et régions à l'est du pays, à l'aube du dimanche dernier, faisant des milliers de morts et de disparus et causant d'importants dégâts matériels.
Farhat Boudhahab, l'un de ces survivants, a déclaré à Anadolu : “Personne ne peut décrire ce qui s'est passé. Tout s'est passé en un clin d'œil. Il a suffi de quelques secondes pour tout changer. La hauteur des bâtiments, la solidité de leurs fondations et leurs emplacements dans la vallée de la ville avaient un rôle déterminant, faisant la différence entre la vie et la mort.
“Il y a des bâtiments élevés avec des fondations solides dont les habitants ont pu survivre en grimpant sur le toit jusqu'à ce que les eaux des torrents se retirent, et il y a des bâtiments situés dans les hauteurs de Derna dont les habitants ont également survécu“, a-t-il ajouté.
Parlant de sa situation, Boudhahab a expliqué : “Je vis dans des zones relativement basses et ma maison dispose de deux étages, mais elle est un peu haute au-dessus du sol, et ce n'est pas comme le reste de mes voisins, dont la plupart vivent dans des maisons à un seul étage, qui ont été submergées par le déluge.
** Survivre dans un réservoir vide
"Dieu seul m'a sauvé, en plus de ma maîtrise de l'architecture qui a également joué un rôle. Mon métier m'a sauvé de la tempête". C'est ainsi que Farhat Boudhahab, rescapé de la catastrophe, perçoit sa confrontation avec la mort.
Dans une interview plus détaillée, Boudhahab a déclaré : "Je dormais à ce moment-là et je me suis réveillé au son d'une énorme explosion. J'ai immédiatement su que le barrage de Derna était détruit, car la pluie était forte et le barrage avait subi des histoires similaires qui se sont produites dans le passé, lors des fortes pluies".
"Quelques instants plus tard, l'eau a inondé ma maison, où je vis seul depuis des semaines. Mes enfants sont avec leur mère dans la ville de Syrte (centre de la Libye)", raconte le survivant.
À propos de sa famille, Boudhahab explique : "Ma femme a déménagé avec mes enfants pour vivre avec sa famille dans la ville de Syrte. Sinon, elle et mes enfants auraient pu trouver la mort".
Concernant la façon dont il a survécu, il a déclaré : “Lorsque les eaux ont inondé ma maison, j’ai grimpé sur le toit et je me suis caché dans un réservoir d’eau en béton, que j’avais moi-même construit il y a des années pour recueillir l’eau des pluies“.
"Je me suis installé dans le noir dans ce réservoir d'eau, après l'avoir bien verrouillé jusqu'à ce que l'eau se retire le matin. J'étais là toute la nuit à prier Dieu pour mon salut", a-t-il raconté.
Ce survivant à une mort certaine, a été “surpris“, selon son expression, après avoir quitté le réservoir, par “les corps des voisins et les destructions qui ont eu lieu sur les lieux“, et d’ajouter : “Mes sentiments étaient mitigés. J'étais très triste pour ce qui est arrivé à ma ville et à mes voisins, et en même temps, j'étais heureux d’avoir survécu“.
** Calme et indifférence
La ville de Derna est la ville la plus touchée par la tempête Daniel, à cause de "l'effondrement des barrages qui retiennent les eaux de pluie et des oueds se déversant de la montagne, qui se jetant dans le cours de la célèbre vallée de Derna", selon des déclarations préalables d’officiels locaux à Anadolu.
Adel Al-Shafi'i, un autre rescapé de Derna, a déclaré : "Nous ne nous attendions pas à cela, bien au contraire. Tout indiquait que la ville de Benghazi serait détruite par la tempête".
Al-Shafi’i a expliqué à Anadolu que “Tous les alertes avant la tempête se limitaient davantage à Benghazi, où des équipes de secours ont été formées, l’état d’urgence a été déclaré et un couvre-feu a été imposé dans la ville“.
“Par conséquent, nous ne faisions pas beaucoup de soucis à Derna et dans le reste des villes de l'est de la Libye. De plus, j'ai appelé mon frère qui vit à Benghazi à midi et lui ai demandé de venir à Derna parce que c'est plus sûr. Il a répondu qu'il y avait un couvre-feu à Benghazi et qu'il ne pouvait pas partir, a ajouté le survivant des inondations.
Mais les choses se sont inversées, d’après Al-Shafi’i qui constate que “Benghazi était l’endroit sûr parce que la tempête l’a contournée pour se diriger vers le reste des villes de l’Est, où de grandes quantités de pluie se sont déversées, provoquant le déferlement des eaux des vallées montagneuses“.
** La chance d’habiter en hauteur
Adel Al-Shafi'i raconte en détail les premiers instants de ce qui s'est passé à Derna : “Le premier barrage a explosé, puis le second, et la vallée de Derna a été inondée avec une force que nous n'avons jamais vu auparavant, emportant tout dans son passage".
“En quelques instants seulement, l’eau a englouti des immeubles résidentiels entiers de six étages“, affirme-t-il.
Et d’expliquer : “Heureusement pour moi et ma famille, nous vivons dans une zone élevée qui a été touchée par le torrent, mais il n'était pas aussi fort et son niveau n’était pas aussi haut que dans les zones basses du côté de la vallée de Derna“.
Al-Shafi'i, qui s'est entretenu avec Anadolu alors qu'il était encore à Derna, a déclaré que la situation dans la ville, trois jours après les inondations, "est toujours catastrophique".
Il a affirmé que "Les autorités sécuritaires ont évacué la ville parce que la foule rendait difficiles les opérations de sauvetage et de récupération des corps, qu’on ne cessait de retrouver, surtout en mer où des bâtiments entiers ont été emportés avec tous leurs habitants".
* Traduit de l’arabe par Mounir Bennour.
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